Tout le monde connaît « le roi », au moins de
nom. Si vous suivez les Grands Prix motos, même depuis
peu, vous savez qu’il existait, par le passé, un pilote italien
(très) dominant. Giacomo Agostini roulait dans le championnat du
monde dans les années 1960 et 1970. Au total, il cumule quinze
titres dont huit en 500cc. Absolument légendaire ! Cependant, ses
exploits concrets ne sont pas tant connus du grand public.
Alors remontons l’horloge !
Nous voilà début 1968. Giacomo Agostini est déjà
considéré comme l’un des piliers du mondial. L’italien est double
champion du monde 500cc en titre, et s’apprête à remettre son titre
en jeu. Il évolue sur une MV Agusta performante,
mais pas encore au sommet de son art : 1967 fut plus que
disputée, et Mike Hailwood sur
Honda scora le même nombre de points que le
roi « Ago ».
Honda, entre temps, décida de se retirer du championnat du monde
afin de se concentrer sur le programme Formule 1; ce qui laissait
le champ libre à MV. Hailwood, seul homme capable de contenir
Agostini, ne put retrouver de guidon à temps. Avant même de
débuter, l’année semblait compliquée pour la
concurrence.
La saison débuta sur le Nürburgring et déjà, le
suspense fut tué dans l’œuf. Agostini partit, loin devant, et ne
fut plus rattrapé. En 350cc, mais aussi en 500cc.
À l’époque, tous les pilotes ou presque courraient dans plusieurs
catégories durant le même weekend, pour le même constructeur.
Cette victoire facile marque le début d’une série encore inégalée
et inégalable. Il faudra attendre l’avant-dernière course de la
saison 1973 pour voir un autre pilote que Giacomo Agostini
franchir la ligne en tête lorsque ce dernier roulait encore, en
500cc. Il s’agit de la plus grande période d’invincibilité
de l’histoire.
Bien sûr, Agostini tomba et abandonna parfois sur casse
mécanique, mais en piste, personne ne termina devant lui « à la
régulière » pendant presque six années. C’est Phil
Read, qui, au Grand Prix de Suède, mit fin au règne
italien. D’ailleurs, c’est le britannique évoluant lui aussi
sur MV Agusta qui
remporta ce championnat.
Le pire, c’est qu’il ne s’agit que de 500cc ! En 350cc, il aura
fallu attendre 1972 et Jarno Saarinen pour
détrôner Ago en course. Au milieu de tout ça figure un record
encore plus imprenable : une série de vingt victoires d’affilée
(abandons et non-participations incluses), de la manche d’ouverture
1968 au Grand Prix d’Ulster 1969.
À ce petit jeu, personne ne peut suivre l’officiel MV Agusta.
Mike Hailwood réussit l’exploit d’en remporter
douze de rang, contre dix pour Mick Doohan,
Marc Márquez et …de nouveau Agostini. À
peine croyable.
Cette série dorée aurait pu s’allonger à plus de trente, sans un
conflit d’ego ! En 1969, le Grand Prix des Nations ne se disputa
pas à Monza pour la première fois depuis la création du
championnat. Imola fut sélectionné en remplacement, mais le comte
Agusta refusa d’envoyer ses machines hors de son fief milanais !
Ceci permit à Alberto Pagani, sur Linto, de remporter sa
première course en 500cc.
Cette petite étude aide à mieux appréhender la domination Agostini.
Un nom qui résonne encore de nos jours, mais qui reste flou malgré
tout. En effet, le championnat du monde perdit un grand intérêt
lors de ces années, au vu de l’absence de constructeurs majeurs. Il
faudra attendre la fin des années 1970 pour
contempler un championnat haletant avec plusieurs usines pour se
partager le gâteau.
Photo de couverture : Ligabo