De passage dans le paddock du circuit Carole pour la manche parisienne du championnat de France F SBK, nous y avons retrouvé beaucoup de vieilles connaissances parmi lesquelles, entre autres, Christian Boudinot.
L’homme a été pilote pendant 10 ans puis mécanicien de Grand
Prix pendant des décennies, concoctant les motos de Randy
de Puniet, Sylvain Guintoli, Jules Cluzel, avant de créer
sa propre Moto2, la célèbre TransFIORmers souvent confiée à
Lucas Mahias.
Christian Boudinot, pour ceux qui ne le
connaissent pas, est un peu forgé du même acier qu’un Guy
Coulon ou un David Muscat : pas vraiment
facile à aborder de prime abord, mais, une fois leur confiance
acquise, des sources inépuisables de savoir prêtes à partager leur
passion totale.
Un pilote, il sait donc ce que c’est, et quand il vous oriente
gentiment vers Justine
Pedemonte en disant « Tu devrais aller voir
Justine : elle roule bien, elle commence à faire des résultats, et
en plus elle est sympa ! », vous savez que vous n’allez pas
perdre votre temps…
Et, effectivement, la jeune fille est souriante et épanouie, le ton
rapide et posé, le discours énergique, la passion évidente…
Alors Justine, peux-tu te présenter ?
« Bonjour, je m’appelle Justine Pedemonte et j’ai 16 ans.
Au début, je ne faisais pas du tout de moto. C’est simple, je
faisais de la danse, ce qui n’est pas du tout pareil, et je
n’aimais pas la moto. Sauf que j’ai vu mon père faire une course de
côte, et ça m’a piqué. Ensuite, j’ai regardé à la télé et j’ai vu
Marc Marquez et Johann Zarco, et j’ai voulu directement faire de la
moto. Donc j’ai commencé la moto à 9 ans sur une PW 50 et
directement après j’ai voulu faire de la compétition. Du coup, en
2017, j’ai fait ma première course en compétition au Creusot, et
après j’ai dit à mon père “ça y est, je veux faire le championnat
complet”. Du coup, j’ai fait le championnat complet Occitanie 25
Power avec une NSF 100 en 2018, et j’ai été championne. Et après,
en 2019, je suis partie en Italie, où j’ai fait le CIV Ovale 160.
Et ensuite, je suis revenue en France où j’ai roulé une année en
Promosport, et là ça fait 3 ans que je suis en FSBK
300. »
Bon, ça c’est le passé. Aujourd’hui, dans ta troisième
année de FSBK 300, comment ça se passe ? Apparemment bien, puisque
tu as fait la pole ce samedi après-midi à Carole…
« Dans ces 3 années, en fait, c’est surtout les 2 années
précédentes où j’ai énormément appris, et pris beaucoup
d’expérience. En 2021, ça ne s’est pas très bien passé, mais
ensuite, en 2022, j’ai commencé à rouler de mieux en mieux, à
prendre plus d’expérience et j’ai fait mon premier podium l’année
dernière au Castellet. Et là, cette année, c’était vraiment l’année
pour gagner, car c’est ma dernière année en 300, donc il fallait
vraiment que je marque des gros points et que je prouve que je suis
là, et c’est ce que je fais petit à
petit. »
Donc là, le bilan de cette saison, qui est déjà bien
avancé, est déjà positif ?
« Alors, ça a
commencé de manière très compliquée avec Le Mans où je suis tombée
aux 2 courses. Mais ensuite, à Nogaro, j’ai fait mon premier podium
de l’année en terminant 2e, puis j’ai gagné à Lédenon, j’ai fini 2e
et 3e à Magny-Cours, et à Pau-Arnos, j’ai encore gagné et j’ai fini
4e, et là, je viens de faire la pole donc on verra comment ça se
passe dimanche. C’est ma première pole en FBK, ma 2e première
ligne, mais ma première pole. »
On est obligé de te demander comment ça se passe avec
les garçons…
« Alors, ça se passe plutôt bien
maintenant, parce qu’en fait j’ai prouvé de quoi j’étais capable.
Je leur ai prouvé que même si j’étais une fille, je pouvais rouler
contre eux. C’est vrai qu’au début, c’était un petit peu compliqué,
surtout au CIV : quand les garçons venaient me voir pour me dire à
quelle heure était le briefing est à cette heure-là, mais en fait
c’était généralement une heure après. C’était un peu compliqué,
mais après je leur ai montré de quoi j’étais capable, petit à petit
ils s’en sont rendus compte. Et puis là, en FSBK cette année, il
n’y a vraiment aucun problème. Je suis vue comme une pilote
et les garçons savent très bien que je vais être là pour me battre
aussi pour la première place. »
Tu as dit que c’était ta dernière année en FSBK 300.
Pourquoi ?
« Parce que j’ai envie d’évoluer !
Je m’entraîne en 600 depuis le début de l’année, déjà pour m’aider
pour la 300, parce que c’est toujours mieux de s’entraîner en 600
puis de passer sur la 300 pour la course. Et puis j’ai envie
d’évoluer. Ça fait maintenant 4 ans que je fais de la 300, donc je
m’entraîne en 600 pour pouvoir essayer de passer en 600 l’année
prochaine. »
Et pourquoi pas en Championnat du monde 300, ce qui
pourrait sembler être une suite logique ?
« Déjà, parce que je n’ai pas l’âge, c’est 18 ans. Et
puis, c’est un peu compliqué le 300 mondial: on ne sait pas si ça
va continuer, et en fait, dès que j’ai fait de la 600, j’ai dit
« c’est ça que je veux faire maintenant ». C’est vraiment
trop bien ! Et puis, j’ai envie d’évoluer, quoi ! »
Aujourd’hui, tu roules sur une Yamaha ? Est-ce que tu as
reçu une aide particulière et/ou des conseils pour l’avenir
?
« Alors oui, Yamaha m’aide déjà grâce au
championnat Yamaha qui est dans le championnat FBK. C’est un
championnat où, par exemple pour moi l’année dernière, ça m’a
permis de faire une wildcard dans championnat d’Europe. En fait,
j’ai fait la wildcard à Magny-Cours, et après ils ont pris les 5
premiers pour représenter la France à Portimao, donc ça nous a
permis de prendre beaucoup de niveau, parce que c’est le
championnat européen. Et puis ça nous fait prendre de l’expérience
de voir comment ça roule en Mondial tout ça. Et puis, ils nous
aident pour quelques pièces. Il y a aussi eu le bLU cRU Camp, que
j’ai fait en 2019 et en 2021, et c’est le maximum. En tout
cas, Yamaha, ils sont vraiment là pour nous. »
Pour ta famille, ce sont de gros sacrifices, financiers
et autres ?
« Ce sont de grosses sacrifices
financiers, c’est sûr, parce que mes parents ne partent plus en
vacances pour pouvoir me payer la saison et tout ça. Après, moi, à
côté, j’essaie de travailler un petit peu pour ramener un peu
d’argent, et comme étude je rentre en première générale cette année
au lycée, parce que de toute façon ma mère m’a toujours dit
« si tu veux faire de la moto, il faut que tu continues de
travailler à l’école ». Mon objectif principal, c’est d’être
pilote moto, mais je veux continuer mes études à côté pour avoir
des débouchés, parce qu’on sait jamais ce qui peut arriver. Donc
là, je rentre en en première générale pour pouvoir ensuite après le
Bac puis faire une école de journalisme pour être journaliste
sportive. »
Sur la moto ?
« Sur la moto, exactement (rires).
En tout cas, moi ce que je veux dire, c’est que je remercie
vraiment tous mes partenaires parce que si je peux faire tout ça,
c’est parce qu’ils sont là. Je remercie mon team, hein, comme
Christian, parce que s’il n’était pas là, je sais pas ce que je
ferais. J’ai de la chance d’avoir beaucoup de partenaires et
beaucoup de personnes qui m’aident et qui sont là pour moi, donc
c’est vraiment top ! »
Merci Justine, on te souhaite beaucoup de plaisir et un beau parcours…
Crédit photos : Facebook Justine Pedemonte