A partir de Motegi, Iker Lecuona se substituera à Dominique Aegerter au sein du team CarXpert Interwetten jusqu’à la fin de saison, et plus que probablement la saison prochaine également.
Ce très jeune pilote espagnol qui court cette année en championnat d’Europe FIM CEV a déjà pu faire deux Grands Prix en remplacement du pilote suisse blessé à l’épaule; Silverstone et Misano. A 16 ans, il vient aujourd’hui de terminer sa première année sur une moto de vitesse, ce qui, au vu de ses chronos dans une catégorie extrêmement concurrentielle, permet d’ores et déjà de le classer dans les très bons espoirs pour les années à venir, d’autant que la toute récente mise à pieds de Dominique Aegerter lui ouvre maintenant une voie « royale » en Grand Prix.
Iker, pouvez-vous nous retracer brièvement votre parcours ?
« Je suis né le 6 janvier 2000 à Valencia et mon père faisait des courses. J’ai donc commencé à aimer les motos très jeune et, peu à peu, je m’y suis mis aussi, en commençant par la MiniMoto à partir de 2008/2009 puis divers championnats régionaux avec une Kawasaki 65 et 85cc à vitesses dans le style SuperMotard. »
La première moto de vitesse ?
« En 2012, j’ai essayé une Pré-Moto3 en Navarre et j’ai fait deux courses. L’année suivante, j’ai couru en Pré-Moto3 jusqu’en milieu de saison puis je me suis remis au SuperMotard pour arriver au titre de champion d’Espagne en 2015. En fin de saison dernière, j’ai été appelé pour rouler en CEV Moto2 dans l’équipe Swiss Junior Team pour faire les courses en Navarra et à Valencia sur une Suter. Cela a plutôt été un bon début puisque j’ai pu marqué trois fois des points en quatre courses. »
Pourquoi une équipe de Moto2 fait appel à un pilote de SuperMotard ?
« J’ai un ami mécanicien qui était dans cette équipe et qui m’avait vu rouler plus jeune. Il a donné mon nom et ils m’ont appelé. »
Quand on vous appelle pour faire de la vitesse, vous préférez encore la discipline du SuperMotard ?
« Non. J’ai toujours aimé la vitesse. Ce qui s’est passé, c’est que je me suis cassé le tibia et le péroné au mois d’août 2013 et j’ai dû arrêter la moto pendant 6 mois. Ensuite, pour reprendre l’entraînement, le SuperMotard était à la fois le plus facile, le plus accessible au niveau des circuits, et le plus économique. J’ai donc continué. »
Comment s’est passé le contact avec la structure de Grand Prix CarXpert Interwetten ?
« En fait, ils surveillent un peu tout ce qui se passe dans
les différents championnats, et ils m’ont repéré sur les vidéos que
diffusent le FIM CEVRepsol. Donc pendant l’hiver dernier, ils ont
parlé avec un ex-membre de leur équipe qui travaillait alors dans
le Swiss Junior Team. L’idée était que CarXpert apporte la moto,
leur savoir faire et un petit budget, le reste du financement
devant venir d’ailleurs.
Il y a eu plusieurs réunions lors du GP de Jerez avec CarXpert et
Aspar, qui était également intéressé par l’aventure, pour trouver
une solution puisque, faute de moyens, je n’ai pas pu faire la
première course du championnat d’Europe FIM CEV. La solution a pu
être trouvée pour le reste de la saison en utilisant la structure
de Sébastien Gimbert, Race Experience. »
Entre le championnat FIM CEV et les remplacements de Dominique Aegerter en Grand Prix, on peut considérer cela comme une première année professionnelle. Comment la vivez-vous ?
« Ce qui me fait le plus plaisir, ce ne sont pas les fastes des Grands Prix mais le fait que je puisse vraiment bien travailler. En roulant régulièrement, je peux m’améliorer progressivement mon pilotage et j’en suis vraiment très content. »
C’est très difficile ?
« Oui. Oui. Dans le championnat FIM, ce n’est pas plus facile mais je suis environ une petite seconde moins rapide que les meilleurs pilotes, ce qui me permet de m’immiscer parmi les cinq meilleurs pilotes. En Grands Prix, je suis encore quasiment dans les derniers mais la vérité est que depuis Silverstone je me suis grandement amélioré et je suis très content. »
Avez-vous pu déterminer les points de votre pilotage qui nécessitent encore une amélioration ?
« Non (rires). Pour le moment, je dois encore prendre des roues pour voir que mes trajectoires et mes freinages sont perfectibles, mais tout seul, je ne m’en rends pas toujours compte. Maintenant, j’arrive à bien passer un virage en suivant quelqu’un ou pas, mais je n’arrive pas encore à le faire à chaque virage. Pour cela, il faut encore beaucoup plus de kilomètres. Pour vous donner un exemple, les pilotes de Moto2 qui ont déjà plusieurs années dans la catégorie derrière eux arrivent avant la tournée asiatique avec parfois jusqu’à 12 000 kilomètres de roulage. Moi, entre le FIM CEV et mes remplacements en GP, j’en suis à peine à 6000. Il faut donc que je roule… »
Qu’est-ce qui vous marque le plus, en Grand Prix ?
« C’est un rêve. Je le savoure particulièrement car, habituellement il faut des sous pour y arriver et y rester. Donc je n’ai jamais cru possible que j’y serais un jour. Et là, je vois que ceux qui ont payé pour y être ne sont finalement pas plus rapides que moi, ce qui est rassurant. Après, ce qui m’a le plus surpris, et agréablement, c’est la façon dont toute l’équipe me traite, toute l’attention qu’ils me portent. Ça fait vraiment plaisir et ça permet de progresser. »
Si l’opportunité de rester en Grand Prix ne s’était pas présentée, que ce serait-il passé ?
« Rien. Je serais resté en Championnat FIM CEV pour continuer à apprendre en espérant qu’une occasion se présente de revenir en GP. »
Vous dormez bien la nuit, ou tout ceci vous stresse ?
« Je dors très bien (rires) et je n’ai pas de problème de stress. »
Quels sont vos objectifs à court terme en GP, sur des circuits que vous ne connaissez pas ?
« Etre bientôt dans les points ou au moins assez proche. »
En FIM CEV, on vous a souvent vu au premier plan en début de course, puis devoir rétrograder progressivement. Pourquoi ?
« Quand les pneus sont neufs, je me sens très bien sur la moto, mais au fur et à mesure que les pneus s’usent, la moto prend de plus en plus de mouvements et cela me coûte de plus en plus pour la contrôler. Je suis moins à l’aise et je dois sans doute travailler sur ma position sur la moto dans ces moments là. »
En GP, nous avons remarqué lors des séances que les autres pilotes espagnols ne voulaient pas vous « tirer » pour apprendre les circuits. Pourquoi ?
« (Rires). Je ne sais pas. Je suppose qu’ils n’apprécient pas que je sois à une demi-seconde d’eux dès mon arrivée. »
Connaissez-vous les autres pilotes espagnols de Moto2 ?
« Oui. Je m’entraîne souvent, sur les Kawasaki 65cc ou des 125cc de série, avec Edgar et Axel Pons, Julian Simon, Isaac Vinales et quelques autres. »
Mais ici, ils ne vous aident pas ?
« Non (rires). »