Après la longue et fatigante tournée orientale, nous avons pu interroger Hervé Poncharal pour faire le bilan de ce trio de courses consécutives que sont le Japon, l’Australie et la Malaisie.
Il s’agit toujours d’un moment un peu particulier de la saison, durant lequel les esprits et les corps sont mis à rude épreuve par les nombreux voyages, les décalages horaires ainsi que les alternances de températures entre la froideur australienne et la chaleur malaisienne. La tension y est également plus vive aussi, car le rythme trépidant de cette tournée peut vite faire passer un problème de l’état de petit à celui de gros, d’autant que les teams ne disposent pas de toute leur infrastructure habituelle.
Même s’ils en partent avec plaisir, rentrer en Europe est
généralement un soulagement pour les hommes du MotoGP, ainsi que
l’occasion de souffler un tout petit peu avant de repartir pour la
dernière épreuve de la saison.
C’est dans ce contexte que Hervé Poncharal, le
patron des teams Tech3 MotoGP et Moto2, a bien voulu prendre de son
temps pour répondre à nos questions, et nous l’en remercions.
Hervé, quel est votre meilleur souvenir de cette triplette orientale ?
« En MotoGP, c’est bien évidemment le dernier tour de
Pol Espargaro en qualification en Australie qui le
met sur la première ligne. Parce que là, avec les conditions météo,
il fallait bien viser pour avoir les bons pneus au bon moment.
C’était chaud car il a fait son chrono dans le dernier tour sous le
drapeau à damier, comme les autres ! C’était ce tour là et pas un
autre; il ne fallait pas se louper !
C’était assez tendu, toute l’équipe était rivée derrière les
moniteurs et suivait tous les partiels; T1, T2, T3, et T4 où tu
peux vite faire une erreur… Mais non, il l’a fait et ça a été un
vrai bon moment de suivre ce tour et de le voir se qualifier sur la
première ligne. Ensuite, se retrouver le lendemain sur la grille
avec personne devant ton pilote, c’est également toujours un moment
agréable et sympa, surtout en Australie car en regardant devant, tu
vois la piste plonger dans l’océan. Un beau moment que toute
l’équipe et moi-même avons bien apprécié.
L’autre meilleur moment, il concerne Xavi Vierge à
Sepang. Alors qu’on avait été très déçus du résultat de la
qualification en Malaisie, puisqu’on avait fait le 4e temps au warm
up et que ça nous donnait encore plus de regret de partir 25e sur
la grille suite à un incident avec Luca Marini (voir ici), Xavi a effectué une remontée qui
n’en finissait pas ! Et c’est quelques chose d’incroyablement
prenant, car quand tu pars 25 et que tu vois ton pilote qui monte,
qui monte, qui monte… tu te dis « bon, ben à un moment, ça va
s’arrêter » parce qu’il va arriver avec les cadors et
que ça va se calmer.
Mais là, à trois ou quatre tours de la fin, on voyait qu’on avait
nos deux pilotes dans le Top 10, avec rouge pour Vierge et rouge
pour Vinales (ndlr : la couleur des meilleurs secteurs et des
meilleurs chronos en course) puisque les deux ont fait le meilleur
temps en course de ce tour là, c’était fabuleux ! On n’est pas des
habitués des Top 5 en Moto2, et là, se retrouver à finir 8e à, je
crois, moins d’une seconde de Marquez qu’on aurait passé avec un
tour de plus, c’est un super sentiment ! La pression se relâche et
tu es très heureux, parce qu’en plus, c’était dans des conditions
difficiles de gras-mouillé puis séchant. Et non seulement,
Xavi a roulé comme un chef, mais Isaac a également fait une
très belle course, et après des essais qualifs difficiles, se
retrouver avec nos pilotes dans le Top 10, avec les chronos qu’ils
ont fait, ça c’est un moment fort, et je peux vous dire qu’on a été
les féliciter à l’arrivée de la course, et ça nous a permis de
partir sur la grille MotoGP avec l’esprit et le cœur beaucoup plus
léger !
Et puis, bien évidemment et même si ce n’est pas mon équipe, un
grand moment de cette triplette est le nouveau titre mondial de
notre futur pilote MotoGP, Johann Zarco !
On n’a pas eu très peur, mais on a un peu douté après l’Australie,
quand on l’a vu un peu empêtré et même se faire doubler par Xavi
Vierge et terminer 12e. Et même s’il avait repris des points sur
son adversaire de l’époque qui était Rins, Lüthi, en gagnant la
course, s’en rapprochait. A ce moment-là, on s’est dit « P…..,
après les courses incroyables qu’il a fait à Barcelone ou en
Autriche, je m’en souviens, des courses de fou, après cela se
retrouver à éventuellement passer à côté de ce titre, ça serait
vraiment dommage ! Et il a redressé la barre comme un grand grand
champion qu’il est, et ça, ça a été un moment fort, et vous pouvez
être certain que tout le team MotoGP Tech3 vibrait en soutenant
Johann pendant la course des Moto2 !
Gagner le titre sur une superbe victoire, après un super week-end
où il a également fait la pole et remporter la course de manière
aussi autoritaire, c’est aussi un très beau moment pour
nous. »
A suivre…