Après la première partie, voici la suite de l’interview qu’Eduardo Martin, le riche homme d’affaire espagnol qui a découvert et accompagne “El Diablo” depuis ses débuts en championnat d’Espagne, nous a accordée avec grande gentillesse.
Et si vous la lisez jusqu’au bout, vous comprendrez à la fois mieux la situation du jeune pilote français et la photo qui illustre cet article…
Ce début de saison est un peu difficile avec 3 places de 13ème et une chute avant Le Mans; êtes-vous inquiet?
Eduardo Martin: « Oui, c’était difficile. Mais non, pas inquiet. Si vous pensez que, par exemple, un pilote magnifique, comme Zarco, a été champion du monde après tant d’années, je ne peux pas être nerveux pour un, deux, ou trois mois. C’est comme ça, il faut travailler. Fabio a eu 17 ans le 27 avril, c’est encore le plus jeune du team. On peut dire que c’est le numéro un du team, mais c’est vraiment le plus jeune.
On a pensé que si on changeait pour KTM, nous aurions deux belles années pour que le pilote évolue en même temps que le team progresserait bien pour faire évoluer une moto qu’il ne connaît pas. On a pris une décision en considérant qu’il s’agissait d’un risque contrôlé. On savait que l’on n’aurait pas directement des résultats, mais ça va venir. On a beaucoup réfléchi sur cette décision, et lui et sa famille le savaient aussi. Et cette décision n’avait rien à voir avec l’argent car nous avions deux propositions supérieures à Leopard. Mais le projet, avec tout le soutien à l’extérieur du circuit pour la préparation de Fabio, n’était pas comparable.
Donc quand on a pris la décision, tout le monde a dit
« ok, il y a un travail à faire et on va le
faire ». On a donc une direction claire.
Comme il est tombé à Misano, il ne lui a pas été possible de rouler
avec une moto jusqu’en janvier. Il a fait beaucoup de travail
physique, il a beaucoup roulé en karting, mais en moto, il ne
pouvait pas. Donc c’est l’année où il a le plus besoin de
travail technique et il doit retrouver ça. On a recommencé à
vraiment travailler en moto à la fin janvier, et le team a commencé
à faire les tests en février. Mais la pluie et le vent ont tout
faussé et la pré-saison s’est réduite à quasiment rien.
On arrive donc à Jerez sans références et sans base de réglages stable. KTM nous a bien donné des réglages, mais mon impression personnelle est qu’ils ne sont pas parfaitement adaptés pour la moto de Fabio car, à chaque fois avec Christian, on les a améliorés. On a fait la comparaison 7 ou 8 fois. Et nos trois pilotes ont le même problème. Il y a donc quelque chose qui ne fonctionne pas bien. Avec le travail que l’on fait, on réduit systématiquement les chronos et l’écart qui nous sépare de la tête.
Ensuite, il est vrai que pour les raisons citées, pas beaucoup de roulage, une pré-saison très réduite, on est arrivé au Qatar sans références. En essais, il a fait un bon chrono, le record, mais ça, c’est seulement sur un tour. La dégradation des pneumatiques en course l’a repoussé 13ème. Ok.
Après, on a eu une situation similaire en Argentine.
A Austin, on a détecté des choses à changer, et Fabio était en mesure de faire le podium mais malheureusement un problème moteur est survenu.
Après on va à Jerez. On y a sacrifié les essais libres et la qualification pour trouver des choses. On a fait des modifications et ça a fonctionné, comme on l’a vu au warm up. Avec son rythme il pouvait être aux avant-postes en course., d’autant qu’il l’avait fait avec un pneu de 20 tours. En course, il y a eu le problème avec Jorge Martin, mais celui-ci a été correct et est venu s’excuser. C’est pas de chance mais c’est la course.
On arrive au Mans. On a commencé à mettre en place un protocole de travail pour être très précis et exploiter au mieux le temps dont on dispose. On travaille aussi à l’adaptation du pilote à la moto et on a parlé à Dominique Sarron que je remercie car il est allé voir Fabio dans trois courbes qui sont difficiles pour lui à cause de sa position sur la moto. On travaille donc avec le pilote et avec les ingénieurs, et systématiquement, on a amélioré. Ici, on a également sacrifié les FP1 et FP2. En FP3, o na testé des réglages et ona amélioré ça à la qualification. En qualification, Fabio est resté à 0.3 du meilleur chrono en un seul tour, avec des pneus froids, car avant, il avait un problème électronique qui coupait le moteur. Après, si vous regardez la course, il a roulé plus vite que tout le monde en début de course, avec que les pneus se dégradent.
On doit chercher pourquoi cela arrive, si ça vient de la pression ou d’autre chose, mais on est proche de la solution. On va analyser ça pour trouver une solution pour la prochaine course. Mais la chose importante et positive, c’est que la direction est claire, la courbe ascendante, et qu’il nous reste encore beaucoup à faire. On est seulement au commencement de la solution. Alors on est tranquille. On a vraiment la sensation de travailler comme une équipe, le pilote a toujours le sourire, et on est vraiment content. C’est bien! Nous nous attendons à de très bonnes choses, mais il faut travailler et ne pas baisser les bras; un champion ne peut pas faire ça.
Je vais vous dire une chose personnelle; si Fabio doit avoir, une fois dans sa vie, un problème comme ça, c’est maintenant. Il est encore jeune. Cette expérience va lui servir pour tout son futur. Avoir le caractère d’un champion quand tout va bien, c’est facile, mais dans un moment difficile, avec la pression de tout le monde, être ferme et penser seulement à travailler mais avec le sourire, ça c’est difficile, mais c’est ce qu’il fait. Il est spécial et je suis très content de lui. Je suis très fier de lui!«