A Valencia, avant de déménager dans le box Suzuki, Carlo Pernat nous a sympathiquement dressé un bilan des saisons de Andrea Iannone en particulier, et de Ducati en général.
Une analyse sans concessions avec comme un goût d’occasion ratée malgré quelques points positifs.
A noter que Carlo Pernat fait toujours l’effort de communiquer avec nous en français.
Carlo Pernat: « Selon moi, honnêtement, on a obtenu moins que ce qu’on pouvait avoir. Surtout au début. Au début, les pistes sont très adaptées à la Ducati. Je parle du Qatar, je parle de l’Argentine et du Texas. Ce sont des circuits où la vitesse de la Ducati fait la différence, par rapport aux autres motos. Probablement que l’aventure Ducati a très mal commencé avec des erreurs de Iannone. D’abord la chute au Qatar, puis le dernier virage en Argentine avec son coéquipier… »
A cette époque là, vous étiez à la fois très en colère et un peu abattu, et vous nous aviez dit « Iannone a perdu la tête »…
« Plus que d’avoir perdu la tête, il a fait une bêtise. Moi
je dis que quand il s’agit de ton coéquipier, tu ne peux pas faire
comme ça, surtout au dernier virage. Si tu es à 4 virages de la
fin, tu peux le tenter, mais pas au dernier, car tu mets tout le
monde en danger. S’il n’y avait pas eu ça, le Qatar et l’Argentine,
probablement que le championnat aurait eu un autre visage, quelque
chose de différent. Et pour les deux pilotes, car après, Dovi a
aussi eu de la malchance avec Pedrosa, des problèmes mécaniques, et
des chutes.
Donc honnêtement, pour moi le bilan n’est pas positif, par rapport
à ce qu’étaient les pilotes et les motos. »
Décevant ?
« Oui, parce qu’on pouvait surement faire 4 victoires,
selon moi, et arriver 3e ou 4e au championnat. C’était un objectif
qu’il était possible d’atteindre.
Mais aussi, on n’a pas eu beaucoup de chance. Mais je me rappelle
de Brno où Iannone était en tête à 5 ou 6 tours de la fin
quand son pneu s’est détérioré. Honnêtement, il faut toujours avoir
un peu de chance et ce n’a pas toujours été notre cas. Mais
la moto a fait un bon pas en avant. Elle n’est pas encore
parfaite, car elle perd encore un peu dans les virages comme à
Valence. »
Quel est son plus gros défaut ?
« A partir du milieu de virage, elle a un peu de mal à
revenir (sous-virage), par rapport aux autres qui vont alors plus
vite. C’est mieux que par le passé mais ce problème n’est pas
encore résolu. Je pense que Gigi le résoudra mais c’est sûr que de
ne pas avoir les ailerons l’année prochaine sera peut-être quelque
chose de négatif. Mais je suis sûr que Gigi travaille bien; il
connaît l’histoire !
On pouvait donc faire mieux, mais honnêtement, on a gagné deux
Grands Prix, après bien des années depuis Stoner en Australie. Donc
Ducati a fait un grand pas en avant et j’espère qu’avec Lorenzo,
ils pourront faire le pas définitif. Ce ne sera pas facile car
conduire pendant six années la Yamaha puis passer à une moto
physique comme la Ducati n’est pas facile. »
Elle reste plus physique que les autres ?
« Oui. C’est plus facile de passer de Yamaha à Suzuki. C’est sûr. Mais on verra, parce qu’après, on parle d’un champion du monde, hein. On parle de Jorge Lorenzo qui, honnêtement, est très fort. »
Tout le monde s’attend à ce que Iannone soit dans le Top5 l’année prochaine, grâce à une Suzuki qui est quand même plus facile à piloter que la Ducati…
« Si je fais une comparaison entre tout ce que j’ai vu, il y a deux pilotes qui font rêver les supporters. En Formule 1, il y a Verstappen, et en MotoGP Iannone. Je crois qu’ils sont pareils, ils font des choses incroyables, parce que Iannone a fait des choses que personne n’a fait. Je crois que ce sont les deux gars qui donnent des rêves aux gens. Après, il faut faire des choses plus complètes, d’accord, mais je pense que les gens aiment beaucoup ces deux types de pilotes qui vont un petit peu contre le pouvoir, contre les règles. Les gens aiment ça. »
Le genre Bad Boy ?
« Oui, c’es exactement cela. Bravo. Mais ce sont des Bad Boys qui vont très vite… »
Stoner était à Valence mais on a senti comme un petit froid entre lui et Ducati…
« Honnêtement, de ce que je sais de l’histoire, dès le début Stoner avait dit qu’il ne voulait plus faire de championnat du monde. Ducati l’a pressé et a bien fait, mais il a dit « non, non, non ». C’est un froid mais ce n’est pas un grand froid. C’est juste à cause de ça, et il n’y a pas d’autre problème. »
Abordons maintenant un avenir beaucoup plus sombre. Vous quittez Ducati pour Suzuki; comment allez-vous faire pour « la pasta » ?
« (Rires) Ma, il y a les cuisiniers italiens chez Suzuki. Davide Brivio a pensé à tous les détails (rires).«