Avant même que le site paddock-GP n’existe, notre parcours journalistique nous avait déjà entraîné à suivre de près toutes les initiatives françaises en matière de sport moto qui pouvaient susciter des vocations et favoriser l’ascension de nos jeunes pilotes vers les Grands Prix.
Nous avons fait de même lors de la saison 2016, en nous intéressant aux diverses avancées en ce domaine, à commencer par l’Ecole itinérante Vitesse et le championnat de France Objectif Grand Prix, deux des initiatives de la Fédération Française de Motocyclisme qui nous semblent intéressantes, mais aussi les Journées Détection de la FFM qui rassemblent un grand nombre de pratiquants, qu’ils soient débutants ou plus confirmés.
Accédez à la première partie concernant l’Ecole itinérante et le Challenge 25 Power
3/ Objectif Grand Prix
Si 2015 fut de nouveau une excellente année pour le sport motocycliste français en général, grâce entre autre au titre mondial de Johann Zarco mais aussi à l’Endurance et au Tout-terrain, un problème était matérialisé par l’abandon de la petite catégorie en Championnat de France FSBK: trop chères à acheter et surtout à entretenir, les Moto3 étaient devenues inabordables pour la majorité des jeunes pilotes français. La Fédération Française de Motocyclisme a donc été contrainte de retirer cette catégorie du championnat, faute de participants.
Pour autant, il n’était pas question d’abandonner définitivement la première catégorie du Championnat de France et, en quelques mois, une solution fut proposée grâce à un partenariat très actif entre la Fédération Française de Motocyclisme, le constructeur français Sherco et un promoteur privé, aboutissant à la formule Objectif Grand Prix que nous vous avons déjà présentée sous plusieurs angles.
Présentation Objectif Grand Prix au Grand Prix de France
Interview du Président de la FFM, Monsieur Jacque Bolle
Résumé de la première partie de saison
Résumé de la seconde partie de saison
Calendrier et Inscription 2017
La solution apportée a donc consisté à rendre très abordable
cette catégorie en se basant sur un moteur de Cross logé dans une
partie-cycle de compétition. Pour remplir le plateau, Sherco a
relevé le défi technique, avec la garantie apportée par la FFM
d’une vente minimale de 10 motos. Ces motos, acquises par la FFM,
ont été louées aux concurrents qui le souhaitaient, abaissant
d’autant la mise de fonds initiale pour se lancer dans le grand
bain de la compétition.
Lors du Grand Prix de France, nous avions pu faire un
premier point avec Monsieur Jacque Bolle, Président de la
Fédération Française de Motocyclisme sur le sujet.
Jacques Bolle: « On considérait que si
on commençait une première année aux environs de quinze
participants, ce serait un succès. C’est pour le moment le cas. On
ne s’attendait donc pas à un raz-de-marée d’autant que de fausses
informations ont été répandues sur les réseaux sociaux, selon
lesquelles le Championnat n’aurait pas lieu ! On a donc perdu
quelques compétiteurs mais je pense qu’à terme, il y a un potentiel
de vingt ou vingt-cinq pour l’année prochaine.
Rappelons que l’on parle ici de vraies motos de course, pas de
motos de série, à la fois très abordable et très faciles à
entretenir. Ce sont, certes des motos de course simplifiées,
basiques, mais des motos de course quand même. Or plus on monte
vers “l’élitisme”, par définition moins on touche de personnes.
Mais on se devait d’avoir quelque chose, puisque là, il y avait
clairement un trou à combler et je pense qu’on l’a
comblé. »
Et, effectivement, ce ne sont pas moins de 22 pilotes qui, à un moment ou un autre, ont franchi le pas en s’alignant en Championnat de France FSBK Pré-Moto3 en 2016, comme on peut le voir en consultant les résultats sur le site de la FFM.
Nous avons donc interrogé Thierry Beaumont, le papa de deux futures participants, Exupéry et Tanguy, pour savoir qui étaient les parents et enfants concernés et ce qu’ils attendaient du Championnat Objectif Grand Prix.
Quel est le parcours de vos enfants, jusqu’à présent ?
« Au niveau moto, ils ont juste fait un peu de motocross, mais sans faire de compétition. Un peu d’initiation et quelques stages pendant les vacances, mais pas de compétition. »
Quel âge ont-ils ?
« 13 ans et demi, et 15 ans. »
Qu’est-ce qui vous a séduit dans le Championnat Objectif Grand Prix?
« Avant tout, l’encadrement qu’il y a autour. Le fait qu’il y ait une structure d’accueil et que les enfants soient encadrés. On a participé aux deux journées de détection à Alès, et ça nous a plu. Le fait que l’on puisse louer les motos a aussi été déterminant, car c’est moins contraignant que de devoir les acheter puis éventuellement à les revendre. On peut rajouter que la présence de Sherco sur les circuits est importante pour les parents qui n’ont donc pas besoin de stocker des pièces d’avance. S’il y a une petite chute, on pourra se fournir sur place. C’est bien aussi. C’est donc tout un ensemble de choses, et c’est déjà pas mal car ce n’est pas évident de se lancer tout seul, surtout quand on n’a pas d’expérience de la compétition. »
Pourquoi n’êtes-vous pas parti vers une coupe de marque ?
« Le fait que les gamins aient de vraies motos de course était important pour eux. De plus, tous les gamins sont dans la même tranche d’âge, contrairement aux coupes de marque dans laquelle on trouve un peu de tous les âges. »
Comment vos enfants abordent-ils cette année ?
« Je ne leur mets pas la pression. Ils ne sont pas inquiets. C’est une année découverte durant laquelle ils vont apprendre les circuits, à commencer par celui du Mans. Ils vont être dépaysés mais il faut rouler avant tout pour se faire plaisir. On verra bien s’ils mordent dedans. S’ils se prennent au jeu, ça ira tout seul. »
Personnellement, vous avez une expérience de la compétition ?
« J’ai pratiqué un peu, tout d’abord en Tout-terrain, puis j’ai fait un peu de piste, en coupe de marque, puis en FSBK et en Endurance au Bol et au Mans. »
Pour savoir si ces attentes ont de bonnes chances d’être comblées en 2017, nous avons interviewé Amaury Leroux, dont le fils, Arthur, a participé à la première saison d’OGP.
Pouvez-nous nous décrire ce qu’étaient vos attentes, votre parcours, et ce que vous avez trouvé chez OGP, en positif comme en négatif ?
« Arthur venait de la Coupe Yamaha. C’est un produit extraordinaire et les enfants s’y amusent comme des fous. Maintenant, même s’il n’était pas à un excellent niveau en tant que pilote, son projet était de vraiment goûter à l’ambiance de la compétition. C’est pour cela que nous nous sommes orientés vers le pré-Moto3, car les motos sont plus dans l’esprit de la compétition, comme en Grand prix, avec un paddock assez riche. On a cherché un peu partout, et ce que propose la fédération française, avec Sherco, répondait à notre attente pour une première approche et une première année. Et nous sommes tellement satisfait que nous reconduisons notre engagement cette année. Honnêtement, ce qui a été proposé, c’est fabuleux !
En tant que parent, arriver dans le milieu de la
compétition, et j’en ai fait en endurance en cross, nécessite tout
de suite une structure, un mécano, etc. Pour quelqu’un qui n’est
pas du milieu, je pense que tout simplement impossible. Et là,
cette prise en main, c’est extraordinaire car c’est une vraie
entrée pour aller en compétition directement en Pré-GP. C’est
vraiment idéal.
le fait d’avoir la fédération française, avec monsieur Bronec
avec des journées d’essais, ça fonctionne. Et c’est comme ça que ça
s’est passé : les enfants peuvent essayer. la première fois, mon
fils a été un petit peu désemparé, et la seconde fois, il a
accroché. En plus, on peut louer une moto. Du fait de louer une
moto, vous êtes accueilli par Sherco sur les circuits, et là, vous
avez l’assistance, car ce n’est pas donné à tout le monde et tout
connaître tout de suite. Là, on est pris en main, on est
conseillé, on vous donne la bonne démultiplication, les bons
réglages de suspensions, etc. Ils viennent avec des pièces
détachées, en cas de chute ou de problème. Mon gamin a fait une
chute à Albi; tout le monde met la main à la pâte et il
repart.
C’est vraiment une entrée dans la compétition extraordinaire
!
Thierry Capela est la cheville ouvrière du système et y joue un rôle essentiel. Je n’ai jamais vu ça ailleurs : il est toujours actif, va sur la grille de départ pour dire un petit mot d’encouragement à chaque gamin, pour leur rappeler aussi qu’ils sont là pour s’amuser et prendre du plaisir. Il est également très vigilant sur la bonne conduite et le bon esprit. Avoir un peu d’agressivité mais sans se mettre en danger. Les parents apprécient cela. »
Mais le panorama que vous me dressez est trop beau…
« Mais c’est la réalité ! En tout cas, c’est ce
que j’ai vécu. Et le milieu de la course, je le connais bien. Ce
résultat est le fruit du travail de chaque instant d’un trio
OGP/Sherco/FFM où chacun a son rôle et le fait de façon
idéale.
Alain Bronec et la FFM amènent la solution des motos que l’on
peut louer, soit à la saison, à la course ou pour même pour un
entraînement. C’est parfait et on est bien accueilli. Sherco
apporte son assistance et son aide et sa passion, mais aussi se
préoccupe des enfants en les accueillant dans des tentes, en louant
un box. Ils vont jusqu’à démonter nos roues pour qu’on aille faire
changer les pneus. Evidemment, on aide, mais le bon esprit est
là.
Thierry capela est le chef d’orchestre et innove sans cesse,
avec des petites tombolas pour gagner des pneus, etc. Toutes ces
personnes sont très méritantes et il faut le faire savoir.
Financièrement, la solution est bonne. Les enfants ne jouent
pas avec les cartons à Noël. Et pour faire une entrée dans le
milieu de la compétition, cette entrée là est extraordinaire.
D’ailleurs, j’y reviens. »
Allez, faites-nous plaisir : trouvez-nous un point négatif ou, au moins, une amélioration à apporter…
« Alors, j’ai proposé que l’on insiste plus sur le fait
que ce sont des enfants en piste. Des enfants qui vont à l’école,
comme tous les enfants, des enfants qui ont chacun un projet de
vie, de vétérinaire à pilote moto comme Rossi, etc. Donc la petite
touche que j’ai proposée, c’est de fournir au speaker les
informations pour qu’il puisse expliquer qui court. Par exemple à
Carole, les enfants venaient de faire leur rentrée à l’école.
Certains en 5e, d’autres en 6e, etc. Je suis allé voir chaque gamin
et leur ai posé deux ou trois questions, puis on a donné cela au
speaker et il a joué le jeu en énonçant que « en tête, il y a
untel, il a tel âge, est de telle région et veut ça dans la
vie ».
Du coup, il y avait une vision différente, et quand les enfants
sont rentrés, il y avait plein de parents spectateurs qui
s’identifiaient. C’est important de bien faire comprendre que ce
sont des enfants qui roulent, d’autant que quand ils ont leur
casque et leur tenue, on ne voit pas que ce sont des
gamins.
C’est la toute petite chose, et pour le reste, c’est juste
parfait. Il y a même un ostéopathe sur place. Chapeau ! C’est un
championnat qui mérite de vraiment réussir. C’est
fabuleux. »
La formule a donc l’avantage de combler le trou qui existait et, visiblement, de combler les participants. Après cette première année de création, elle demandera à se renforcer en 2017 où, pour le moment, on y attend entre 18 et 22 pilotes permanents.
Le budget est bas et pourrait surprendre ceux qui s’adonnent à la compétition moto de vitesse. Il est le fruit d’un engagement de la FFM qui a acheté 10 motos Sherco pour permettre de lancer la formule. Aujourd’hui, elle les loue pour la somme de 4800 euros annuelle, ce qui permet au plus grand nombre de franchir le pas.
Il faut rappeler que, contrairement aux motos des multiples
coupes de marque, la Sherco est une véritable moto de
compétition, alliant un moteur monocylindre 250 cm3
4-temps de tout-terrain et une partie-cycle spécialement conçue en
vue de son utilisation exclusive sur circuit.
La Sherco est donc la solution clef en main idéale pour faire ses
débuts face aux Moriwaki MD, Metrakit et autre BMS Honda (Objectif
Grand Prix est ouvert à toutes les marques) d’autant qu’elle peut
également être utilisée en Championnat d’Espagne Pré-Moto3 avec de
minimes modifications, pour ceux qui désireraient se confronter à
l’étranger.
Malgré son coût très modéré, elle s’est montrée performante et fiable, comme en témoignent les deuxièmes et troisième places de Matthieu Grégorio et Joris Ingiulla derrière la Moriwaki de Clément Rougé, le champion de France 2016.
Objectif réussi, donc, pour cette relance de la catégorie d’entrée du Championnat de France, d’autant qu’elle devrait naturellement se renforcer avec le temps, aussi bien au niveau du nombre de participants que de l’homogénéité du plateau.
4/ Les Journées Détection FFM
Ce que l’on appelle communément les Journées Détection de la FFM ont ceci d’originales qu’elles regroupent bon nombre d’initiatives de la fédération en faveur de la vitesse.
Ainsi, on y retrouve mélangés l’Ecole itinérante, des participants du Championnat 25 Power FFM, des participants du Championnat Objectif Grand Prix, et même des pilotes de vitesse de Grands Prix et de WSBK, tels Fabio Quartararo, Florian Marino, Louis Bulle ou Enzo Boulom.
Nous nous sommes rendus sur le circuit Carole et au Pole Mécanique d’Ales pour constater de visu comment se déroulaient les choses, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elles se déroulent plutôt bien.
Evidemment, pas question de « jeter » tout le monde en piste en même temps, mais l’organisation est très rigoureuse et les groupes de pilotes se succèdent sans discontinuer, avec un laps de temps très réduit entre chacun d’entre eux : la piste est utilisée au maximum et les pilotes en ont d’autant plus pour leur argent que les pilotes sont invités par la fédération.
Cette hétérogénéité des groupes est un facteur de motivation supplémentaire pour les plus jeunes et il est inutile de vous décrire comment sont considérés les « vrais pilotes » par ceux qui forment la base de la pyramide…
Il est important de noter que la fédération met à chaque fois l’accent sur la sécurité des pilotes, que ce soit en piste, évidemment, mais également en apportant un éclairage sur les précautions à prendre quand on s’adonne au pilotage, que ce soit par les conseils de Christian Sarron, mais aussi la présence d’un médecin et d’un ostéopathe ou d’un spécialiste de l’audition.
Les explications de ce dernier avaient de quoi faire prendre conscience de la nécessité de se protéger les oreilles… même aux plus âgés d’entre nous !
Si, entre la fraîcheur de Carole et l’asphalte surchauffé d’Alès, les conditions étaient très différentes, on y a retrouvé la même organisation et la même passion des participants, le tout dans une ambiance extrêmement conviviale, que ce soit en piste ou après les heures de roulage, le soir dans le paddock. La plupart des parents s’entraident mutuellement à préparer les motos pour le lendemain alors que les enfants, car il s’agit bien d’enfants, jouent entre eux.
Au final, et sans parler du côté purement détection, où les représentants de la FFM peuvent apprécier tel ou tel pilote en vue de l’aider dans le futur, ces journées de roulage constituent un excellent brassage des différentes catégories et sont vécues comme une sorte d’entraînement/récompense par les pilotes eux-mêmes .