A l’entame du dernier Grand Prix de la saison MotoGP 2020, les représentants des six constructeurs impliqués en catégorie reine se sont exprimés devant la presse réunie virtuellement à Portimão.
A tour de rôle, chacun a pu faire un bilan de sa saison avant de répondre aux questions des journalistes.
Après Davide Brivio pour Suzuki, Paolo Ciabatti a pris la parole, interrogé comme il se doit sur les trois sujets brûlants concernant Ducati au terme de cette session 2020 : la rupture avec Andrea Dovizioso, la non présence des pilotes de Borgo Panigale en tête du championnat malgré l’absence de Marc Márquez et la difficulté d’adaptation des GP20 au nouveau pneu arrière Michelin…
Paolo Ciabatti (Ducati Corse Sporting
Director): « Je suis d’accord avec l’analyse que Davide
(Brivio) vient juste de faire. Je pense que cela a été une saison
inhabituelle. Nous nous souvenons tous où nous en étions en mars,
quand nous étions supposés courir au Qatar et que la Covid ne nous
a pas permis d’y courir puis qu’il y a eu des doutes sur le fait
qu’il n’y aurait peut-être pas de championnat du tout en 2020. Donc
je pense qu’avant tout, c’est une excellente chose que nous soyons
ici et que nous ayons pu faire 14 courses malgré la situation
difficile. Je pense que nous pouvons en être heureux et fiers. Dans
notre cas, bien sûr, vous pouvez penser qu’à cause de l’accident
que Marc (Márquez) a malheureusement subi lors de la première
course nous pourrions être un des candidats pour remporter le
championnat, puisque dans les années précédentes nous avons
toujours été deuxième derrière Marc avec Andrea Dovizioso, mais
pour plusieurs raisons, le format du championnat, les courses
consécutives, une adaptation difficile de notre moto au nouveau
pneu arrière Michelin ainsi que le fait que le style de pilotage
habituel avec les précédentes versions de notre moto n’a pas
vraiment bien fonctionné pour certains de nos pilotes, tout cela a
rendu les choses difficiles pour nous. Donc globalement, je dirais
que nous avons été compétitifs et que nous nous sommes battus pour
le podium quasiment à chaque course, mais toujours avec un pilote
différent. Je pense qu’à l’exception d’Aragon, nous nous sommes
toujours battus pour le podium avec un de nos pilotes, et nous
avons mis cinq pilotes sur le podium : l’ensemble des cinq pilotes
sous contrat avec Ducati est monté sur le podium, y compris Zarco
sur la moto 2019. Et c’est également pourquoi nous sommes
maintenant proches de Suzuki en tête du championnat, même s’ils ont
remporté plus de courses et qu’ils mènent avec le même nombre de
points. »
« Donc d’un côté nous somme déçus de ne pas avoir été en mesure
de nous battre pour le titre pilote. Je pense que la régularité a
joué un grand rôle pour Suzuki et Joan Mir : Ils ont fait un
excellent travail, donc chapeau ! Comme je l’ai dit, nous n’avons
pas été réguliers avec tous les pilotes : différents pilotes lors
de différente courses sur le podium, mais jamais avec les mêmes
garçons. »
Peut-on comparer cette saison à celle de 2016, où Michelin a fait son retour en MotoGP et où il a fallu s’adapter aux nouveaux pneus, et cela peut-il augurer d’une saison 2021 comme celle que vous avez faite en 2017 ?
« Je pense que si vous regardez les résultats de cette année, nombreux sont les pilotes qui ont été capables de faire d’excellentes choses à une course avant de rétrograder aux courses suivantes. Je pense donc que tout le monde a connu des moments difficiles pour s’adapter, car cela a dépendu des conditions de piste, et dans le cas de Ducati nous avons peiné quand l’adhérence était faible. Donc bien sûr, nous avons aussi connu des moments difficiles mais nous avons évidemment beaucoup appris cette saison. Nous avons beaucoup appris cette saison et je pense que nous avons certaines idées pour l’année prochaine. L’année prochaine, nous tournerons également la page car nous aurons de nouveaux pilotes qui rejoindront le team d’usine, venant tous les deux du team Pramac Racing. Et bien sûr, ce week-end est émouvant car nous dirons au revoir à Andrea (Dovizioso) et Danilo (Petrucci). Andrea aura été avec nous pendant huit ans, Danilo pendant six ans si nous comptons également les quatre années passées dans le team Pramac Racing. Mais quoi qu’il en soit, nous devons regarder devant et je pense que nous avons certaines idées pour nous développer dans le futur et, espérons le, être très réguliers l’année prochaine lors de la plupart des courses, car c’est le seul moyen de se battre pour le championnat. »
Le nouveau pneu arrière Michelin semble mieux s’adapter à certaines motos que d’autres. Que souhaiteriez-vous de la part du manufacturier français ?
« Comme vous le savez, il est vrai que cette année a été un peu différente à cause de ce qui s’est passé avec la Covid. Il est vrai que, comme d’habitude, nous avons eu les tests en Malaisie et au Qatar, mais nous n’avons probablement pas pu continuer les activités qui étaient normalement programmées pour développer avec le nouveau pneu, donc je pense qu’il est certain que dans notre cas il n’a pas été facile d’adapter notre moto à la nouvelle allocation pneumatique. Et bien sûr, comme tous les constructeurs, nous avons coopéré avec Michelin pour essayer d’avoir quelque chose dans le futur qui sera probablement un peu plus, je ne dirais pas mieux mais je dirais plus stable en termes de performances possibles avec des conditions différentes. Je pense que c’est le domaine sur lequel nous souhaitons travailler ensemble avec Michelin, et il est probable que tous les autres constructeurs veulent faire la même chose. »
Suzuki réussit bien avec deux pilotes et vous en avez six : pensez-vous limiter le nombre de pilotes à l’avenir ?
« Nous avons actuellement six pilotes mais nous en avons déjà eu huit en MotoGP, donc je pense que pour Ducati, gérer six pilotes est quelque chose que nous faisons depuis de nombreuses années et je pense nous somme bien organisés. Recueillir les données de six pilotes nous aide à faire de meilleurs choix car avec le système que nous avons, tous les ingénieurs Ducati qui gèrent les pilotes se rencontrent à la fin de chaque journée pour partager les informations et les données. Nous pouvons donc recueillir les données de six pilotes et nous continuerons comme ça l’année prochaine. Comme vous le savez, nous aurons Pecco (Bagnaia) et Jack (Miller) dans le team d’usine, ainsi que Jorge Martin et Johann Zarco chez Pramac, et deux rookies, Enea Bastianini et Luca Marini dans le team eSponsorama. C’est donc assez excitant, et si bien sûr nous ne savons pas si nous pourrons continuer avec six pilotes en 2022, nous sommes pour le moment heureux de continuer comme ça car nous pensons que cela nous donne la possibilité non seulement de recueillir plus d’informations mais aussi d’évaluer de jeunes pilotes qui, éventuellement et comme cela s’est passé cette année pour l’année prochaine, peuvent passer du team satellite soutenu par l’usine au team Factory, ou monter d’un cran comme Zarco l’a fait en passant d’un team satellite à un team satellite soutenu par l’usine. »
Avez-vous des regrets en ce qui concerne les relations qui ont eu lieu entre Ducati et Andrea Dovizioso ?
« Il est vrai que nous avons célébré beaucoup de victoires, ensemble avec Andrea Dovizioso. C’est probablement le pilote qui a la plus grande longévité dans l’histoire de Ducati de ces dernières années, avec huit années consécutives. Nous avons rejoint Ducati ensemble, début 2013, et c’est donc une histoire longue de huit ans que nous avons écrite ensemble en MotoGP. Remporter 14 courses, 14 Grands Prix, et finir trois fois consécutivement à la deuxième place du championnat a définitivement été un excellent travail, et c’est toujours triste quand une relation comme ça se termine. Je pense évidemment qu’il y a des raisons pour cela, des deux côtés, mais il est peut-être également vrai qu’après huit années passées ensemble, il y a probablement le besoin de tourner la page et d’essayer de faire les choses d’une manière différente avec une énergie nouvelle. Je pense donc que pour le moment nous essayons de conclure cette relation dimanche avec le meilleur résultat possible, puis évidemment il sera alors peut-être temps de discuter plus en détail des raisons qui ont conduit à cette décision, mais comme je l’ai dit nous chérissons ces huit années passées ensemble et les résultats obtenus, car évidemment Andrea a été le meilleur pilote après Casey Stoner, en terme de victoire en Grand Prix avec Ducati, et c’est quelque chose dont nous nous souviendrons toujours. »
A suivre avec Lin Jarvis…
Retrouvez ici Davide Brivio pour Suzuki
Crédit photos : MotoGP.com