Certains records ne seront probablement jamais égalés.
Ceux détenus par Agostini
ou
Surtees dépendent entièrement de l’époque, et plus jamais nous
ne verrons des saisons aussi dominées. En revanche, d’autres
records paraissent assez « aisément » accessibles, notamment ce qui
touche à la précocité. C’est justement le sujet
d’aujourd’hui.
Cela ne vous aura pas échappé, la moyenne d’âge du mondial ne fait
que baisser d’années en années. À tel point que Marc Márquez compte
parmi les plus vieux top pilotes en MotoGP à 28
ans seulement !
Tous les records de précocités ont été battus au XXIe siècle… Sauf
un, et pas n’importe lequel ! Grâce à une troisième place au Grand
Prix du Venezuela 1977, Iván Palazzese est encore
aujourd’hui le plus jeune pilote à être monté sur un podium, à 15
ans et 77 jours. Une statistique incroyable.
Pourtant, les autres noms de la liste sont bien plus familiers et
en accord avec nos à priori : Can Öncü, Marc Márquez,
Scott Redding et
Jonas Folger suivent de près. Le nom du vénézuélien à
la carrière accomplie mais tragique cache une histoire
magnifique.
Vénézuélien, bien que né en Italie, Iván
déménage très tôt en Amérique du Sud accompagné de
sa famille. Ce n’est qu’à son adolescence qu’il se prend de passion
pour la moto, roulant une petite 125cc, parfois sur circuit. Il
faut savoir que sur ce continent, le Venezuela est sans aucun doute
le pays le plus marqué par la culture motocycliste et l’on y compte
plus de bons pilotes qu’en Argentine ou au
Brésil.
La popularité naissante de Johnny
Cecotto dans ce nouveau marché pousse la
FIM à organiser un Grand Prix sur ces terres. Pour
1977, Palazzese décide donc de tenter sa chance en tant que
wildcard. Il avait déjà eu l’opportunité de rouler sur le circuit
de San Carlos, ouvert depuis 1972.
À 15 ans, on n’est qu’un bambin. Pour participer à la course, Iván
est obligé de mentir sur son âge ! Stratégie payante. Après un
effort à peine croyable, il parvient à hisser sa
Morbidelli en troisième place, derrière Ángel
Nieto et Anton Mang, rien que ça. Il est
la sensation du jour. La firme italienne l’embarque en Europe, et
une fois de plus, il s’y démarque. En 1982, il remporte ses deux
premières courses en 125cc.
Venemotos, importateur Yamaha au pays, avait monté
une structure de Grands Prix afin de promouvoir cette jeunesse
passionnée. En 1983, il est engagé en 250cc aux côtés de
Cecotto et Carlos Lavado, deux
légendes. Malheureusement, l’expérience du quart de litre ne
fonctionne pas. Un podium à Assen en trois ans ne suffit pas. À 25
ans, le natif d’Alba Adriatica est sans guidon en
mondial. Quelques piges sur Rotax puis un retour
sur Yamaha, toujours en 250cc, n’y changeront
rien.
Aprilia décide d’engager Iván à plein temps pour 1989,
l’occasion parfaite de se refaire une santé. Si le début de saison
est encourageant, la situation tourne au drame.
À Hockenheim, Le vénézuélien suivait Andreas
Preining quand ce dernier serra son moteur, entraînant sa
chute à l’entrée du stadium. Palazzese, juste
derrière, ne put l’éviter. Sur le point de se relever et de se
mettre à l’abri, il se fit percuter par Bruno
Bonhuil et Fabio Barchitta.
Virginio Ferrari, bientôt retraité, est le premier à
s’arrêter sur les lieux de l’accident, et par conséquent le premier
à constater la mort d’Iván, gravement touché à la
poitrine.
À seulement 27 ans, sa vie s’est brusquement arrêtée sur le bitume
allemand. Une vie de plus en moins. Derrière chaque innocente et
bête statistique peut se cacher une histoire poignante.
Alors, pour cela, on espère que le record de Palazzese ne
sera jamais battu.
Photo de couverture : ICGP Brasil