Présent sur le circuit depuis 2004, Aleix Espargaró est
un pilier du championnat. L’Espagnol s’est illustré au fil des
années, notamment au milieu du peloton, avec des machines souvent
moins performantes que les meilleures. Si l’on met ses
accomplissements en perspective, est-il l’un des meilleurs pilotes
sur la dernière décennie ? Analyse.
Dans ce genre de débat, la popularité est importante. Beaucoup
accorderont, inconsciemment ou par pure hypocrisie, la sympathie
d’un pilote et son niveau. Ainsi, la famille
Espargaró n’est pas appréciée, en particulier par les fans
français.
Laissons les téléspectateurs irrespectueux de côté. Ici, nous
étudierons les faits et la performance uniquement. Après un début
de carrière modeste, Aleix débarque en MotoGP lors de la
saison 2010.
Chez Ducati Pramac, la sauce ne prend pas
immédiatement. Chose rare, surtout à l’époque, il décide de revenir
en Moto2 pour une année – mitigée – avant de se relancer en
catégorie reine, cette fois chez ART Aspar.
Cette équipe du fond de grille ne tarde pas à embrasser
les règles CRT, expliquées dans cet article. Pour
faire simple, il s’agit d’une « catégorie dans la catégorie », qui
met en avant les petits budgets afin de remplir la grille.
C’est le déclic. Espargaró fait de son mieux
avec les moyens du bord, et score de nombreux top 10 sur une
machine pas à sa place. Il s’empare du titre de « meilleur pilote
CRT » devant son coéquipier Randy de Puniet pour
12 points.
Randy est encore en très bonne forme; Beaucoup ne s’attendaient pas
à ce qu’il se fasse battre de la sorte. Déjà, les conflits en
internes se font entendre. L’Espagnol est un bosseur acharné, qui
ne pense qu’aux résultats. Encore maintenant, c’est un trait de
caractère que nous ne pouvons pas lui reprocher.
En 2013, Espargaró fait parler la poudre sur sa machine clairement
inférieure, si bien que le développement lui était largement
confié.
La saison 2014 est un autre excellent exemple.
Aleix faisait sans doute partie des cinq meilleurs de la grille,
comme le prouve sa pole position à Assen et sa deuxième place en
Aragón, alors sur une Yamaha Forward de seconde zone.
Son talent fut d’ailleurs récompensé en 2015 par un guidon Suzuki,
pour leur grand retour aux affaires. Une fois de plus, il offre à
la firme ses talents de développeurs et une pole position en
Catalogne.
Même chanson chez Aprilia. Sixième pour sa
première course, et de beaux résultats cette année après un
véritable chemin de croix. Maintenant le résumé dressé,
intéressons-nous à l’argumentaire.
Aleix Espargaró est l’un des meilleurs pilotes de la décennie
passée…
I. Parce qu’il a montré une force de caractère
unique
Le natif de Granollers ne baisse jamais les bras. Sa droiture,
le seul à vraiment batailler avec Rossi à Valence en
2015, sa détermination et sa passion en font l’un des plus
solides mentalement.
Quand on doit évoluer avec une machine clairement inférieure,
pensez-bien que ce n’est pas drôle de devoir la traîner tous les
weekends. Espargaró aurait pu, après deux saisons de galères chez
Aprilia, partir en WSBK L’abandon, il ne connait
pas.
II. Parce qu’il est l’un des mieux entraînés
À 31 ans, Aleix affiche l’un des – si ce n’est le – meilleur
physique de la grille MotoGP. Ses entraînements sans fin, axés sur
l’endurance physique, ont transformés ses muscles en pierre de
taille. Sa spécialité ? Le vélo, à très haut
niveau.
Ce dernier a été aperçu à de nombreuses reprises sur les routes
montagneuses, parfois en très bonne compagnie. Les cadres de
l’équipe pro Movistar Team Alejandro Valverde
(vétéran du cyclisme et multiple champion du monde) et
Nairo Quintana comptent parmi ses coéquipiers
d’entraînement, c’est dire. Pour durer aussi longtemps et aller
aussi vite, il n’y a pas de secret.
III. Parce qu’il est (très) souvent le meilleur à moto égale.
Contrairement à la Formule 1, les duels intra-équipes MotoGP ne
sont pas tant rabâchés par les médias. Pourtant, en tant que
pilote, votre premier rival est celui qui évolue avec votre
matériel. Hormis 2016 et l’excellente saison de
Maverick Viñales chez Suzuki,
Espargaró n’a jamais terminé derrière son
équipier, en dix saisons.
Pourtant, les noms honorables se sont succédé. Mika Kallio,
Randy de Puniet, Colin Edwards, Stefan Bradl, Maverick Viñales (en
2015), Scott Redding, Bradley Smith, Andrea Iannone, Sam Lowes
…
Tous ont fini derrière. Sur une période aussi longue, il faut se
référer à Andrea Dovizioso ou Marc
Márquez pour des statistiques similaires.
Que pensez-vous du cas Aleix Espargaró ? N’hésitez pas à
nous le préciser en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport