Parti depuis la neuvième place sur la grille suite à une pénalité, Johann Zarco a mené un Grand Prix de France au Mans tout en attaque et le couteau entre les dents, pour parvenir à arracher une place dans le top 5 à l’arrivée, juste derrière son compatriote Fabio Quartararo.
Le pilote Pramac est revenu sur sa performance auprès des journalistes, et, comme à notre habitude, nous vous retranscrivons ici l’intégralité de ses propos, dont la première partie, qui fait usage du tutoiement, correspond aux questions posées par les médias français.
Johann, comment s’est
passée ta course ?
« Je suis plutôt satisfait. Ce
n’était pas évident en partant de la neuvième place, mais j’ai
vraiment essayé de m’extraire de la grille au mieux. Mais dès que
la moto s’est mise à cabrer j’ai perdu du temps. Donc le départ
n’était pas bon, mais par la suite j’ai été assez incisif, à la
fois pour garder ma place mais également pour faire des
dépassements, quand bien même il n’était pas toujours facile de
bien placer la moto dans les virages. Je suis donc satisfait du
combat que j’ai pu livrer à ce niveau-là, et ensuite de mon rythme
de course car j’ai pu faire une remontée intéressante. Beaucoup de
pilotes ont fait des erreurs, donc j’ai bien fait attention à
rester concentré, et j’ai mis du temps à doubler Takaaki Nakagami.
Curieusement, j’avais un manque d’accélération dans le dernier
virage qui me coûtait énormément de mètres dans la ligne droite
suivante. Par conséquent l’effort que je fournissais dans le
dernier secteur ne me servait pas à doubler, et c’est pour cette
raison que j’ai mis du temps à passer Nakagami. Ce manque
d’accélération, je le mets sur le compte de trop de wheelie et de
trop de coupures électroniques, et c’était sans doute lié au fait
d’être collé au cul d’une autre moto qui nous retirait l’appui dont
on pouvait bénéficier durant les essais. Ce fut une vraie
différence par rapport aux essais, et cela n’a pas rendu la tâche
facile. Mais j’ai tout de même affiché un bon rythme, et par la
suite j’ai eu besoin de souffler un petit peu quand je me suis
retrouvé derrière Marc Márquez, et quand je l’ai passé j’ai encore
fait un effort en pensant que je pouvais rattraper le groupe devant
moi, mais ils étaient trop loin. Ensuite il y a eu la chute de
Pecco Bagnaia et je me suis retrouvé en cinquième position. Je me
suis dit que cela aurait été bien de remonter encore, mais la
raison l’a emporté et j’ai préféré prendre ces 11 points et
continuer à avancer. Ce fut une bonne course, et un bon
weekend. »
Tu as eu un accrochage avec
Brad Binder dans le premier tour ?
« J’ai fait un
bon dépassement à la première chicane : j’ai dû lâcher les freins
donc je suis entré un peu fort, et je n’ai pas réussi à gagner de
places car Fabio Quartararo et Nakagami ont réussi à me repasser.
Mais par la suite quand on est entrés dans le virage de la
Chapelle, j’avais encore Nakagami juste devant moi et je savais
qu’il avait tendance à élargir sa trajectoire, et donc j’ai décidé
de prendre une ligne bien serrée pour le doubler, mais Binder était
à l’intérieur. Sur le coup j’ai pensé que c’était Jorge Martín qui
m’avait touché mais non, c’était Binder. Personne n’a chuté mais
cela a été un bon contact. Dès qu’on veut tenir sa place ou doubler
d’autres gars, force est de constater que les contacts surviennent
quasi lors de chaque course. »
Ta belle remontée te
fait-elle d’autant plus regretter d’avoir été pénalisé sur la
grille [Zarco, initialement qualifié en sixième position, a dû
rétrograder de trois places pour avoir gêné Pol Espargaró en piste
samedi] ?
« Je n’ai pas de regret, pour la simple
et bonne raison qu’au niveau du rythme je sentais que je n’étais
pas encore là où je veux être. Il y a tout de même des progrès, et
c’est pour cela qu’il ne faut pas lâcher le morceau, car c’est
peut-être plus long que prévu, mais il y a beaucoup de choses que
j’arrive à intégrer. Donc pas de regret, car si j’étais parti
devant, c’est vrai que j’aurais sans doute eu plus de facilités
pour rester avec les autres, mais comme je n’ai pas encore le
déclic pour faire ce que je veux avec la moto, ça coince toujours.
Ça progresse, c’était une bonne course, mais même en partant plus
devant je n’aurais pas été capable de faire aussi bien qu’Enea
Bastianini. »
Est-ce que tu as vu la
chute d’Álex Rins [Zarco a été victime d’un tout-droit similaire à
celui du pilote Suzuki vendredi, en parvenant cependant de son côté
à rester sur sa machine] ?
« Je l’ai vu sortir,
c’était à un moment où j’envisageais de doubler, mais quand on voit
quelqu’un sortir on sait qu’il va y avoir des drapeaux jaunes, et
donc on ne tente pas de dépassement pour éviter tout risque de
pénalité. Mais je l’ai vu effectivement sortir, et après je l’ai vu
par terre. Par la suite on m’a expliqué qu’en fait au moment où il
est revenu sur l’asphalte il avait de l’angle avec sa moto, et donc
il a été désarçonné à la retombée. »
Comment vas-tu aborder la
prochaine manche au Mugello ?
« Avec la même
mentalité que ce weekend. C’est vrai qu’on aura peut-être un petit
avantage avec la Ducati, car Michele Pirro [le pilote d’essais
Ducati] a fait des essais récemment et il va donc falloir se servir
de ses retours. Je pense qu’il va aussi falloir garder un œil sur
Pecco Bagnaia, car l’an dernier il y avait été très fort mais il
avait chuté en début de course. Par-dessus cela il aura l’aigreur
de ne pas avoir marqué de points ici. Faire partie de ces Ducati ce
serait donc une bonne chose, et si on peut faire un podium 100%
Ducati ce serait génial. Je me souviens que l’an dernier Fabio y
avait été très fort [le pilote Yamaha s’était imposé en Toscane, un
peu à la surprise générale] alors que de mon côté j’avais essayé de
le bloquer avec ma puissance pendant que lui me repassait dans les
virages. Cela avait été une belle course. Par la suite j’avais
galéré et j’avais même manqué le podium, j’avais dû finir quatrième
ou cinquième. Mais là la moto est un poil différente. On n’a plus
cet avantage qu’on pouvait avoir dans les lignes droites. Mais au
niveau pilotage il y a toujours des choses à faire avec cette moto,
et j’espère pouvoir tirer mon épingle du jeu au Mugello après une
bonne semaine d’entraînement. »
Qu’est-ce qui te manque sur
les départs jusqu’à présent ?
« Quand j’arrive à
être régulier, il me manque les premiers mètres, et si j’essaie de
partir fort sur ces premiers mètres, je ne gère pas bien
l’embrayage. La moto cabre et j’ai tendance à couper les gaz. C’est
facile de dire qu’il faut rester à fond à ce moment-là, et je ne
peux pas dire que j’ai vraiment peur de me retourner. Alors je ne
sais pas si ce sont des réflexes ancrés, mais j’ai beau avoir
conscience de cela, au moment voulu ce n’est pas un geste naturel
pour moi. Le problème est que le niveau est tellement relevé qu’il
faut que ce soit naturel, sinon on manque d’aisance. »
Est-ce que tu t’es servi du
front device ?
« Le seul endroit où je m’en suis
servi c’était à la sortie du virage 8, à la sortie du Garage Vert,
parce qu’il y avait ensuite une vraie ligne droite suivie d’un vrai
freinage. On a essayé de l’utiliser également à la sortie du virage
14 en début de weekend, mais entrer dans la chicane Dunlop avec le
système activé ce n’était tout simplement pas possible. Du coup sur
ce circuit on ne l’a utilisé qu’à un seul endroit, mais au fond ce
n’était pas une si mauvaise chose car ça forçait à reprendre
d’autres sensations, et cela peut servir pour le Mugello.
»