Marc Marquez a pris la mesure de sa situation, a compris de quelle délicate situation il commence à sortir, mais ce chemin est encore long, et il s’en est totalement ouvert lors de la présentation de la série documentaire « MotoGP Unlimited » à venir. Le MotoGP veut grandir, s’ouvrir sur d’autres plateformes comme Amazon et nous montrer la discipline de l’intérieur, comme l’intimité des pilotes. Un exercice qui pousse aux confidences et celles de Marc Marquez sont tout simplement poignantes, donnant une dimension encore plus grande du personnage qui est un homme avant d’être un pilote…
Marc Marquez s’est confié en toute transparence sur les épreuves qu’il a traversées et celles qui l’attendent encore, car il n’est pas sorti d’affaire. Tout ce qu’il a ainsi enduré et ce dont il souffre toujours l’ont changé. L’octuple Champion du Monde revient de loin, sa chair a été meurtrie, son esprit ébranlé, ses certitudes diluées dans cette succession de blessures qui ont été autant de menaces non seulement pour sa carrière mais pour sa vie au quotidien. Et le pilote Honda sera toujours en sursis, avec cette diplopie qui peut revenir à tout moment… Cela vous change la vie, incontestablement.
Sur cette situation, Marc Marquez a commenté : « la vérité c’est que je vais bien, je souris toujours et c’est le plus important après avoir touché le fond pendant deux ans » commence-t-il. « Suis-je de retour ? Disons que je reviens. Je serai vraiment de retour quand mon niveau sur la piste sera le même qu’avant. Jusqu’en 2019 j’ai touché le ciel, c’était le summum de ma carrière d’athlète et là j’ai dû vivre le revers de la médaille, qui sont les blessures. Tu en subis une, tu sors, tu entres dans une autre… Maintenant il semble que la lumière qui est au bout du tunnel brille un peu plus ». Ce qui signifie, aussi, qu’il est encore dans ce purgatoire…
Marc Marquez : « il y a une douleur psychologique qui est très difficile à accepter »
Et l’identification n’est pas trop forte. A l’écouter, c’est même exactement ça… Les blessures, explique Marc Marquez, l’ont en partie changé : « eh bien, la douleur change votre caractère. C’est quelque chose qui ne m’est jamais arrivé auparavant. Ce n’est pas la situation ou l’incertitude, c’est juste que vous ne vous amusez pas. L’année dernière, par exemple, je participais au championnat du monde mais avec des douleurs et des malaises, des choses ont changé mon caractère et tout le monde autour de moi en a souffert. J’ai demandé à tout le monde de me pardonner, car quand j’ai souffert mon caractère a changé et j’étais moins réceptif à tout. Mais ils ont compris ».
Il poursuit : « trois chirurgies du bras vous font souffrir, mais plus que la douleur, c’est l’incertitude de ce qui va se passer. Une fois que vous revenez et que vous voyez que vous ne pouvez pas y arriver, il y a une douleur psychologique qui est très difficile à accepter. J’ai effectué un exercice qui m’a aidé, qui consiste simplement à regarder le moment sans créer d’attentes. Tout cela m’a aidé à sortir de ce tunnel et alors que je sortais avec deux victoires consécutives et que tout semblait bien se passer, lors d’une séance d’entraînement, je suis tombé et je me suis retrouvé avec cette blessure à l’œil qui m’a donné un hiver de peur ».
« La vision double est bien pire qu’une blessure osseuse, car dans une blessure au bras, vous avez un plan et vous voyez que cela s’améliore, qu’il y a une progression et ils vous disent toujours qu’avec le temps, cela guérira. Mais la diplopie… je l’ai déjà eue en 2011, Je connaissais les risques. Le docteur Bernardo Sánchez Dalmau, qui a toujours été très sincère et honnête, m’a présenté trois scénarios : « Attendons trois mois. S’il ne guérit pas, il y a une opération qui peut être tentée trois fois. Et si cette opération ne se passe pas bien, eh bien mon garçon, peut-être que tu n’auras plus la vue pour faire de la moto, mais peut-être que tu as juste besoin de mener une vie normale« . Eh bien, à ce moment-là, je ne pouvais même pas avoir une vie normale et le sport est passé au second plan « .
« Quand le médecin te le dit, tu finis par pleurer seul dans une pièce, parce que tu sais ce qui peut arriver. Peu importe à quel point vous êtes optimiste et à quel point vous voulez faire de la moto et en sortir, vous devez être réaliste. Se raconter des histoires ce sont des conneries, il faut en parler et savoir qu’il y a une possibilité que tu ne puisses plus mener une vie normale. Maintenant, le médecin dit que c’est un miracle qu’après deux mois et demi ou trois mois, ma vue soit guérie et n’ait entraîné aucune conséquence ».
« Je ne veux pas revenir au même Márquez mais être une évolution »
Sur Mowmag, on lit la leçon qu’il a tiré de cette épreuve : « j’aurais été tout aussi fort sans tout ça, j’aurais préféré l’éviter. Oui, ça fait voir un autre regard et mûrir d’une autre manière. Et comprendre le sport même d’une manière un peu différente. Toujours avec le même dévouement, mais maintenant je prends mieux soin de mon corps, je fais plus attention, je réfléchis un peu plus avant de dire des choses, je ne veux pas revenir au même Márquez mais être une évolution ». Cependant… « L’objectif, en tout cas, c’est de se battre pour le championnat du monde. C’est très clair pour moi. Je travaille et je fais d’énormes changements dans ma vie pour essayer de me battre en 2022. Peut-être que dès le début je ne commencerai pas dans les meilleures conditions, mais l’année est très longue ».
Puis il termine en assurant que si toutes ces péripéties l’ont bel et bien mis à l’épreuve, elles n’ont nullement fragilisé les fondations : « si j’avais peur, je ne penserais pas à me battre pour un championnat du monde ou à concourir. Si vous avez peur ou doutez et pensez que vous pourriez tomber, descendez de la moto et donnez votre place à quelqu’un d’autre ». Respect.
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