Avec Giacomo Agostini et Valentino Rossi, l’Italie va briller encore un bon moment au firmament des Grands Prix moto. Le palmarès respectif des deux hommes rend ainsi cette Nation quasi inaccessible, surtout depuis que les efforts de Marc Marquez à faire recoller l’Espagne ont été mis en pause depuis les blessures qui le handicapent. Reste qu’entre Ago et Vale, c’est aussi une histoire de génération et d’égo sur fond de grand respect mutuel. Celui qui sera octogénaire en 2022 parle de son époque, de l’actuelle et de l’après. Et c’est toujours passionnant…
Sur Moto.it, Giacomo Agostini s’est confié sur les mondes d’avant et d’après, comme sur lui-même et Valentino Rossi. Deux noms et deux monuments que les chiffres mettent en exergue : Ago, ce sont quinze titres et 123 victoires. Vale, ce sont neuf couronnes et 115 réalisations, comme 235 podiums et 65 pole-positions. Il est maintenant retraité comme son aîné qui peut donc encore attendre et voir venir pour ce qui est de son record de 15 championnats, soit le score qui lui tient le plus à cœur selon son aveu.
Agostini remet aussi la construction de son palmarès dans le contexte d’une époque qui était radicalement différente. Il dit ainsi : « même à notre époque, la tension n’était pas faible. Vous pouviez mourir facilement, je partais pour la course de TT et peut-être que trois coureurs étaient morts la veille. Je devais avoir la force et la capacité de fermer mon esprit. Le stress était déjà présent à l’époque : j’avais du mal à avaler quand je devais faire une course. Malheureusement, nous pouvions mourir ».
Puis il dit : « Marc Marquez a chuté 144 fois et il a pensé « je n’ai jamais rien »… Aujourd’hui, ils n’ont pas cette pensée que nous avions, que le samedi, peut-être, Bill Ivy était mort et que le dimanche je partirais avec sa couronne funéraires à mes côtés. Aujourd’hui, on ne voit pas beaucoup les pilotes, ils sont enfermés dans leur camping-car, mais le stress est le même que d’habitude, on veut et on doit gagner ».
Ago parle aussi d’une excentricité qui était indécente en son temps et qui est à présent quasiment exigée pour exister : « à l’époque, nous étions tous plus fermés et plus formels, nous avions honte de faire les choses que Valentino faisait et que le public aimait. Je me souviens être venu à Milan peut-être pour dîner dans un restaurant et avoir caché la voiture, j’avais la Giulietta Sprint qui à l’époque était magnifique. Tu réalises ? Nous étions plus réservés, et les enfants d’aujourd’hui ne sont plus comme ça ».
Giacomo Agostini : « si Dieu m’a tant donné, peut-être me dit-il maintenant : sois satisfait«
Sur la longévité de Valentino Rossi sur la piste, qui a poursuivi son chemin jusqu’à supporter les dernières positions, Agostini revendique son approche différente : « j’étais peut-être plus amoureux de la moto que lui. Question de caractère : quand j’ai vu que je ne gagnais plus comme avant, et j’ajouterais que je gagnais encore quelque chose, je me sentais triste. Peut-être aussi par fierté. Et puis beaucoup de choses ont commencé à mal tourner, des casses moteurs, des pneus. Avant, tout marchait bien… peut-être, me dis-je, c’est un signe : j’en ai eu beaucoup, j’y ai échappé, peut-être que c’est un avertissement. Si Dieu m’a tant donné, peut-être me dit-il maintenant : sois satisfait ».
Cependant, il fait aussi cette mention d’un Doctor qui va se reconvertir dans le sport-automobile : « je pense que la course avec les voitures lui sert comme à moi : une aide pour continuer à vivre intensément. Si vous aimez votre travail, vous quittez votre amour, que vous n’aurez plus jamais, alors c’est difficile. Il a beaucoup tiré avant d’abandonner, car abandonner n’est jamais facile… ». Et puis, vieillir est aussi difficile à accepter. Agostini termine en effet ainsi sur un prochain anniversaire qui mettra 80 bougies sur le gâteau : « ne me dites rien… Je suis déjà invité à beaucoup de fêtes, mais le fait est que je n’ai pas envie de faire la fête… ».
