C’est désormais officiel : Maverick Viñales ne
sera plus pilote Yamaha la saison prochaine. Dans
le paddock, les spéculations vont bon train, mais aujourd’hui,
l’heure est au bilan. Que retenir de son passage ? Erreurs
de jugement ou simple rendez-vous manqué ? Analyse.
Afin de rester concis, clair et pertinent, cet article sera
organisé sous la forme d’un plan, en quatre parties bien
distinctes.
I) Le successeur
Le début de carrière de Maverick est un exemple.
D’abord turbulent mais diablement rapide en 125cc, il impressionne
pour ses débuts. Il s’acclimate parfaitement à la
Moto3 dès 2012, et remporte le titre en 2013, l’un
des plus relevés de l’histoire.
Attardons-nous
sur ce sacre, remporté lors de la dernière course à
Valence face à Álex Rins et
Luis Salom, car c’est sa force mentale qui fit la
différence. Pons chapeaute son passage en Moto2
pour 2014, et une fois de plus, « Top Gun »
s’adapte instantanément.
En règle générale, le passage de la plus petite à la catégorie
intermédiaire conditionne la carrière du pilote. S’il s’accommode
vite, il y a fort à parier que de grands succès l’attendent. Un an
plus tard, le voilà sélectionné par Suzuki pour participer au
nouveau programme MotoGP.
L’adaptation est une nouvelle fois réussie, traduite par un
succès dès 2016, le premier depuis Chris
Vermeulen au Mans en 2007 pour la firme
d’Hamamatsu. Son style de pilotage coulé le
rapproche indéniablement de la Yamaha, pilotée à l’époque par le
maitre en la matière, Jorge Lorenzo.
C’est dans ce contexte que Viñales débarque chez
Movistar Yamaha MotoGP en 2017, remplaçant «
Por Fuera » parti chez Ducati. Toutes les
conditions semblent réunies, mais l’on connaît la suite de
l’histoire.
II) Un échec ?
C’est une question primordiale. Son passage est-il un échec ?
Certainement pas. Depuis 2017 Maverick a remporté
au minimum une course par an sur cinq ans, ce qui représente un
véritable tour de force. Depuis l’instauration de l’ECU unique en
2016, seul lui et
Andrea Dovizioso ont réussi un tel exploit.
Que l’on soit bien clair : Finir deux fois troisième dans un
championnat du monde MotoGP n’est en aucun cas un échec, surtout
avec 8 victoires et 13
pole positions (à l’heure où ces lignes sont
écrites). Le fait est que tout le monde attend mieux au vu de son
immense talent.
Le premier enseignement est celui-ci : Il n’y a pas que du mauvais
à retenir de son passage chez Yamaha. La marche supplémentaire
était tout simplement trop élevée.
III) Un passage réussi pour autant ?
Yamaha, ce n’est pas Suzuki, avec tout le respect que nous
éprouvons pour la marque. C’est l’une des deux plus grandes écuries
de l’histoire du sport, donc performer n’est pas un choix, la
réussite n’est pas une option.
Toute sa carrière, Viñales était « l’underdog »,
celui que l’on n’attendait pas. Si l’on excepte les dernières
courses du championnat Moto3 2013, « Top Gun » n’eut jamais de
pression vis-à-vis des résultats durant sa carrière. En signant le
contrat Yamaha, il passe du côté des favoris, un statut difficile à
assumer même pour un bon pilote.
Les premières courses de 2017 se passent bien, mais c’est dans la
difficulté que l’on attend les grands champions. Quand le doute
s’installe, cela devient très difficile à gérer.
C’est exactement ce qu’il s’est passé. Le monde entier avait les
yeux braqués sur Viñales, et il n’arrivait pas à faire abstraction.
La suppression de ses réseaux sociaux, il y a quelques temps à
peine, montre que ce dernier est sensible à la question du regard
des autres.
Lui-même avoua manquer de motivation, de ressources mentales pour
performer. Maverick a ses « bulles de sûreté », des circuits où il
est à l’aise, confiant de son talent, comme Assen
ou Silverstone. En ce sens, il est parfaitement
comparable à
Dani Pedrosa, qui manquait mystérieusement de
performance sur certains tracés favorables à la Honda.
Faire preuve de combativité n’est pas de se battre pour une
victoire, c’est de se battre pour une sixième place quand tout est
contre vous. La vitesse n’y peut rien, » il faut plus que
cela pour être un combattant « .
IV) Clap de fin ?
Rien n’est plus dangereux qu’un pilote de haut niveau, conditionné
pour gagner depuis sa naissancece, ce qui est le cas de Viñales, au
pied du mur, quand personne ne l’attend. En fonction de sa machine
l’an prochain, il pourrait bien en surprendre plus d’un, comme s’il
retrouvait des chaussures à sa taille.
Si, en plus de cela, il essaye de se renforcer dans sa tête, il y a
fort à parier qu’il parte en mission pour 2022.
Photo de couverture : Michelin Motorsport