Il y a onze ans, une avalanche déferla sur le paddock
MotoGP. L’éclosion d’un monstre, d’un prototype tout droit
sorti d’un laboratoire. Ensemble, revivons la saison 2010 de
Jorge Lorenzo, l’un des plus grands exploits
individuels de l’histoire des sports mécaniques.
En 2008, un nouveau nom fait son apparition en Grands Prix moto.
Remplaçant de Colin Edwards chez Fiat
Yamaha Team aux côtés de Valentino Rossi,
le jeune Jorge Lorenzo impressionne.
Double champion du monde 250cc en titre, rien que ça. Pour sa toute
première apparition en catégorie reine, le majorquin casse le
chronomètre : pole position et 2e place à l’arrivée au
Qatar. Un mois plus tard, il remporte sa première
course à Estoril. Surdoué.
L’auditoire est stupéfait, mais la phase d’apprentissage est
longue. De nombreuses chutes, parfois lourdes, mettent à mal le
prodige et ralentissent son accession au sommet. Valentino Rossi,
lui, renaît durant cette période, empochant deux titres coup sur
coup en
2008 et 2009.
À l’entame de la saison 2010, tout semble calme. « The
Doctor » reste le grand favori, devant un Lorenzo en perte
de vitesse fin 2009. Honda, porté par le duo
Pedrosa/Dovizioso, reste en embuscade, tout comme
la Ducati de
Casey Stoner.
L’australien, référence absolue il y a quelques années encore,
n’écrase plus la concurrence. Sa Desmosedici est
moins performante, seul son talent peut le sauver un tant soit peu.
Suzuki ne devrait pas représenter plus de danger.
Lors de la manche d’ouverture à Losail, Rossi
prend fermement les commandes en s’attribuant la victoire, devant
son dauphin Lorenzo. Les deux officiels Yamaha profitèrent
largement de la chute de Stoner, alors en tête de
la course.
À Jerez, Lorenzo frappe fort. Engagé dans un duel à couper
le souffle avec son meilleur ennemi Dani Pedrosa, il tire
le meilleur de sa Yamaha pour s’imposer dans les derniers instants.
Rossi conclut le podium à moins d’une seconde.
C’est au Mans que les choses se gâtent pour la concurrence.
Jusqu’ici, le style de pilotage coulé, sans erreurs, précis au
possible de « Por Fuera », n’avait échappé à
personne. Pourtant, quelle ne fut pas la surprise des spectateurs
français devant la leçon de pilotage du jour.
Oui, une leçon. Parti deuxième derrière son
coéquipier, Jorge colla près de six secondes, sur le sec, à
Valentino Rossi lui-même. Pour enfoncer le clou, il célébra de
manière arrogante, sur une chaise de camping avec du popcorn.
Le caractère bien trempé de l’espagnol tranchait avec tout ce que
l’on avait l’habitude de voir, du moins depuis le Rossi du début
des années 2000. D’ailleurs, si les deux ne s’aiment pas tant que
ça, il n’est pas difficile de constater l’admiration qu’éprouve
Jorge Lorenzo à l’égard de la légende
italienne.
En attendant, il y avait un « nouveau shérif en
ville ». Au Mugello, la saison bascule. Rossi se blesse
lourdement aux essais, ce qui compromet le reste de sa saison.
Lorenzo à le champ libre, et la victoire de
Pedrosa en Italie n’y changea rien.
Inutile de créer du faux suspens; le reste de la saison de «
Por Fuera » est une masterclass. Vainqueur à
Silverstone (+7.0s d’avance), à
Assen (+3.0s),
Catalogne (+4.7s), avant de
retomber deuxième au Sachsenring, son « circuit
maudit ».
Une première partie de saison salée, avec de la rivalité, de
l’arrogance et du niveau à revendre. Rendez-vous
mardi 29 juin à 20 h 30 pour la suite et fin
du récit.
Photo de couverture : Alex Simonini