Pour un tas de raisons,
la saison 2015 est entrée dans l’histoire par la grande porte, que
l’on soit d’accord avec le dénouement ou pas. Le championnat,
encore indécis en Australie, ne pouvait mieux se dénouer.
Retour sur une course folle, où un homme en particulier
s’est illustré.
Petit rappel du contexte. En arrivant sur l’île australe, Valentino
Rossi est en excellente posture au championnat. Ce dernier dispose
de 18 points d’avance sur son coéquipier et rival Jorge Lorenzo.
D’ores et déjà, il peut tuer le championnat. Phillip Island est un
circuit qui lui réussit bien : avec sept victoires,
dont une en 2003, l’un des plus grands exploits de l’histoire,
il est le maître des lieux.
Lorenzo, lui, est en délicatesse. Longtemps dans l’ombre de
Casey Stoner, il n’a remporté qu’un seul Grand Prix d’Australie
en 2013, bien aidé par un drapeau noir infligé à Marc Márquez. Ce
dernier ne peut plus jouer le championnat depuis la manche
précédente; mais il reste un danger constant.
Pour rappel, l’animosité existe déjà avant même d’avoir posé un
pied en Océanie. En Argentine comme à Assen, « The
Doctor » et Marc se sont touchés pour la victoire.
Deux faits de courses qui compteront pour l’explication finale.
Les essais qualificatifs ne laissaient pas présager un beau
spectacle. Márquez, en un seul run, coucha tout le monde sur la
grille. Un deuxième pour enfoncer le clou, au revoir, merci.
Derrière, la bataille fut rude. Andrea Iannone, sur Duacti usine,
pourchasse Jorge Lorenzo en le suivant sur chaque sortie,
«stratégie » qui a le don d’agacer le champion
espagnol.
Les deux réalisèrent le même temps au millième près. L’italien
fut finalement qualifié deuxième, grâce à son deuxième meilleur
temps, meilleur que celui de Lorenzo. Beaucoup d’observateurs
furent surpris de cette décision, tant son application est rare.
Historiquement, le premier qui réalise son meilleur tour
est qualifié devant l’autre.
Dani Pedrosa se classe quatrième et Rossi réalise
une contre-performance. Placé septième, il devrait cependant
remonter assez facilement jusqu’au top 5. En 2015, l’électronique
n’était pas harmonisée, ce qui signifie que les meilleurs teams
dominaient bien plus qu’actuellement. Il était rare de voir une
autre équipe que Honda Repsol ou Yamaha
Movistar triompher.
À l’extinction des feux, tout ne se passe pas comme prévu pour
Márquez. Il n’arrive pas à se détacher, d’autant plus que Lorenzo
montre une vitesse ahurissante. Les deux semblent un peu plus forts
que les autres. Parce que derrière, ça pousse.
Andrea Iannone joue les trouble-fête, tentant des
freinages d’outre tombe à chaque virage. Souvent, il est contraint
de virer au large et ne peut pas faire tenir le dépassement. Ces
manœuvres intimident considérablement les Espagnols, au moment où
une mouette se dresse sur le chemin de « Joe le
maniaque ».
Dans la descente de Lucky Heights, il baisse la
tête et percute le pauvre oiseau. Il en fallait plus pour le
déconcentrer. Rossi, derrière, est rapidement remonté. Il bataille
avec Dani Pedrosa, et Crutchlow en embuscade.
Dans les tours suivants, Lorenzo se détache. Derrière, un groupe
distinct se forme, composé de Márquez, Rossi et Iannone; La
bataille fait rage. Tout le monde dépasse tout le monde sans
complexe.
Si vous suivez les Grands-Prix depuis quelques années maintenant,
vous savez que quand Jorge Lorenzo s’échappe, il est impossible de
le reprendre …99 % du temps. Un Márquez animé réalise l’impensable
et recolle à « Por Fuera ». Il traîne les
autres derrière lui, et le groupe est de nouveau compact à quelques
tours de l’arrivée.
Dans les derniers instants, la RC213V n°93 dépasse et prend la
tête. Il franchit la ligne avec deux dixièmes d’avance sur Jorge.
Iannone, à peine derrière, passe la ligne en troisième place et
prive Rossi de podium. L’écart au championnat est réduit à
11 petits points, à deux courses de l’épilogue.
52 dépassements dans ce groupe de tête. Une course pour l’éternité,
un Márquez taille patron. On ne le sait pas encore, mais les
pilotes n’allaient pas arrêter de parler de cette course d’aussi
tôt… Affaire à suivre.
Photo de couverture : Box Repsol