Avec seulement quatorze Grands Prix disputés, la saison
2020 parut courte. Bien entendu, ce contexte particulier
justifie un tel calendrier. Pour l’occasion, cinq courses furent
doublées et l’Espagne accueillit plus de la moitié des manches. Un
exercice tortueux et sans précédent. Enfin, en êtes-vous
sûr ? Retour en 1980, lorsque les stars du mondial
s’apprêtèrent à courir une saison pour le moins rocambolesque.
Tout commence fin 1979. Kenny Roberts est en passe d’être titré
champion du monde 500cc lorsque les problèmes débutent pour la FIM.
Le championnat se porte bien et se professionnalise de plus en
plus. La fin du « Continental Circus » est
proche, bien que son âme soit encore présente.
Treize courses sont disputées cette année-là. Ce n’est qu’une
course de moins qu’en Formule 1, discipline à la popularité
grandissante. Pourtant, tout ne se passe pas comme prévu
lors de la planification de la saison à venir.
Au Venezuela, rien ne va plus. L’obscur circuit
de San Carlos accueillait le mondial depuis 1977
et l’explosion de Johnny Cecotto sur le plan
international. Construit dans un champ, il est dans la lignée de
ces tracés fait de bric et de broc, sur une surface parfaitement
plane. Les gros problèmes financiers précipitèrent sa disparition
du calendrier.
Ce fut l’heure d’oublier un tracé… oubliable. Fait marquant :
Barry Sheene remporta tous les Grands Prix 500cc
du Venezuela. Bon, un circuit en moins, ce n’est
pas si grave. Sauf que dans la foulée, la Suède annonce ne plus
pouvoir payer également ! Anderstorp,
mythique circuit nordique, avait été remplacé il y a peu par
Karlskoga, aussi connu sous le nom de
Gelleråsen.
Le circuit était conçu comme une arène, de manière à ce que chaque
partie soit visible pour les spectateurs, peu importe la place de
leurs sièges. Le tourniquet Suédois ne réussit pas à attirer les
foules, à la différence d’un Anderstorp plus populaire. Au
revoir la Suède.
De Treize, l’on passe à douze. Rien de bien inquiétant, mais les
choses n’allaient pas tarder à empirer. La FIM décida de faire
débuter la saison en Autriche, mi-avril. Cela reculait le lancement
de l’exercice 1980 de plus d’un mois par rapport à 1979.
Le mondial pose ses bagages sur le Salzburgring.
Sous les yeux ébahis de la direction de course, il est en train de
neiger sur le tracé. L’organisation s’attendait à tout, sauf à ça.
Au bout du troisième jour, la décision d’annuler le Grand Prix est
prise ! Dans l’histoire, c’est rarissime : il faudra
attendre Silverstone 2018 pour revivre
l’annulation d’une course.
Dix manches. C’est tout ce qu’il reste. Pour un
championnat qui se veut de plus en plus professionnel, ça fait
tâche. Ce n’est pas fini pour autant.
Spa-Francorchamps était hôte du Grand Prix de
Belgique. Cette manche mythique avait causée un immense tollé en
1979. La majorité des pilotes n’avaient voulu courir en raison de
la dangerosité de la piste : il fallait donc retrouver un
remplaçant.
Le plat pays n’est pas grand. Zolder, situé dans
la partie flamande, se positionne en tête. Le circuit est beau, en
forêt, mais peu adapté aux motos tant il est sinueux. À peine
quatre kilomètres, mais ça fera l’affaire.
Outre cela, beaucoup d’autres dates furent modifiées : le
Grand Prix d’Allemagne, tenu à Hockenheim en 1979,
passe au Nürburgring et du 6 mai au 24 août. Idem
pour le GP de France, qui passe du Bugatti (2
septembre) au Paul Ricard (25 mai).
La saison eut quand même lieu du 11 mai au 24 août, et fut marquée
par la disparition d’éminents pilotes français. Patrick Pons,
Olivier Chevallier, Christian
Léon et Eric Olivier perdirent la vie,
tout comme Patrick Depailler en Formule 1. Côté
championnat, moins de suspens. Roberts, sur
Yamaha écrasa la Suzuki de Randy
Mamola et ne laissa aucune place au doute.
Une saison comme celle-ci est le témoin d’une époque révolue. Tout
en voulant se professionnaliser, le mondial gardait cette petite
touche de folklore non déplaisante. Cependant, impossible de fermer
les yeux quant à la dangerosité ambiante. Une dizaine de morts par
an nous semble totalement impensable de nos jours et c’est ici le
propre de l’histoire : nous rappeler le chemin
parcouru et les erreurs à ne pas reproduire.
Photo de couverture : Rob Bogaerts / ANEFO