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Depuis que les carénages aérodynamiques ont fait irruption sur la scène en 2015, nous avons observé beaucoup de conceptions et de styles différents. Parmi eux, les carénages favorisant un appui aérodynamique élevé apparaissent de temps en temps mais semblent avoir peu de succès.

L’objectif du carénage aérodynamique est d’augmenter l’appui pour limiter les wheelings. Mais c’est cette force d’appui qui crée des problèmes dans d’autres domaines. Cela peut rendre la moto extrêmement lourde à l’avant, ce qui perturbe l’équilibre. La force d’appui peut amener la moto à tendre au sous-virage et être difficile à faire changer de direction, donc sur certaines pistes, ces carénages ne fonctionnent tout simplement pas.

 

Honda a dévoilé cette conception particulière au test de Sepang en 2018

 

Les premiers commentaires des pilotes concernant ce carénage était qu’il permettait fortement de réduire le wheeling, fournissant beaucoup plus d’appui que le précédent. Il y a plusieurs raisons à cela. La première est que l’élément aérodynamique supérieur est suffisamment espacé de l’élément inférieur.

Pour créer une force d’appui, l’air qui circule autour d’un aileron produit de la haute pression au-dessus de celui-ci et de la faible pression en dessous. La séparation de ces deux densités d’air est ce qui crée une déportance. Si les éléments qui composent l’aileron sont trop rapprochés, les flux d’airs finissent par se mélanger, former un vortex et ainsi réduire la force d’appui créée. Nous avions abordé cela plus précisément dans notre article sur l’importance des ailerons.

Deuxièmement, ce carénage créé une force d’appui élevée en raison de sa surface et de son angle d’attaque. La surface de cet aileron est relativement grande et son angle d’attaque est assez élevé, pour favoriser l’ascenseur vortex.

Cependant, dans la mesure où ce carénage aérodynamique était performant en termes d’appuis, il a également des inconvénients.

 

Marc Márquez en action avec un carénage à l’aérodynamisme poussé

 

L’un de ces problèmes concernait les virages. En MotoGP, l’aérodynamisme est extrêmement compliqué car le centre de gravité et l’angle de la moto changent constamment, de sorte que le niveau d’appui créé est également en constante évolution.

Lorsque la moto se trouve à des angles d’inclinaison élevés, le carénage aérodynamique crée moins d’appui, mais il en crée toujours. Bien que le poids à l’avant aide un pilote à avoir une meilleure sensation et une plus grande capacité à tourner, un poids trop important peut faire en sorte que la moto pousse plus loin et sous vire. Dans notre cas, ce carénage aérodynamique particulier n’était pas idéal pour les virages.

Marc Márquez a commenté que l’équilibre de la moto n’était pas tout à fait correct avec ce carénage particulier et que cela serait difficile pour lui d’être rapide sur le long terme.

 

La « cuillère », appendice aérodynamique controversé présent sur la Ducati. Il a tout d’abord été présenté comme un élément de refroidissement du pneu arrière.

 

C’est un commentaire très intéressant car un peu plus d’un an plus tard, Ducati a dévoilé «la cuillère», le petit winglet qui se trouve sous le bras oscillant. Cet appendice aérodynamique crée une force d’appui qui aide à équilibrer la moto. À des vitesses élevées, où des carénages aérodynamiques à forte force d’appui (comme celui illustré ici) font que la moto sous vire largement et qu’il est difficile de changer de direction, la cuillère redirigerait un peu de poids vers l’arrière de la moto, réduisant ainsi la force d’appui sur le pneu avant, permettant à la moto de retrouver son équilibre.

 

Álex Márquez aux tests de Sepang en 2020. Le carénage ressemble fortement à celui testé en 2018 par son frère.

 

Au test de Sepang 2020, Honda semblait avoir choisi ce carénage aéro pour leur RC213V 2020. Il est possible que ce soit une évolution de ce que nous avons vu en 2018, car il y ressemble fortement.

L’espace entre l’élément supérieur et l’élément inférieur de l’aileron est plus faible, ce qui suggère qu’il créé peut-être légèrement moins d’appui que le carénage aérodynamique de 2018 et est ainsi plus maniable en courbe.

 

Deux packages aérodynamiques différents cohabitaient dans le box du HRC lors des tests de Sepang en début d’année

 

Après le test de Sepang, Honda semblait satisfait de ce carénage et a souhaité valider son fonctionnement lors du test du Qatar. Malheureusement, il n’était pas si efficace que ça sur une autre piste et ils ont trouvé beaucoup de problèmes. Le Qatar, un circuit à grande vitesse et avec de nombreux changements de direction à vitesse élevée, représentait plus un défi pour ce carénage aérodynamique qu’à Sepang qui comporte moins de changements de direction.

Après avoir testé de nombreuses configurations différentes, Honda a estimé que le carénage aérodynamique de 2020 était la cause de la grande majorité de leurs problèmes et est revenu au package 2019.

 

La Ducati GP19 d’Andrea Dovizioso est équipée du fameux carénage « Hammerhead »

 

Comme pour de nombreux éléments aérodynamiques, ce fut Ducati qui fut le premier à innover et à essayer différentes solutions. En photo ici lors du test au Qatar en 2017, Ducati a dévoilé son carénage « Hammerhead » (pour tête de requin marteau, la forme du carénage étant fortement ressemblante). Il permet de créer beaucoup d’appui, l’usine admettant que l’appui était si élevé que la moto rendait presque 10 km/h sur la ligne droite principale comparé au  carénage conventionnel !

Ducati a déclaré qu’ils avaient l’intention d’utiliser ce carénage sur des pistes plus lentes où une accélération forte en sortie de virage en 1ère et 2ème vitesse était nécessaire, mais il n’est plus apparu sur une piste depuis 2017.

 

Vu de face, le carénage « Hammerhead » est assez radical. Le nez de la Ducati ressemblerait à s’y méprendre à l’avant d’une F1

 

Il avait l’air assez radical et offrait d’excellentes propriétés de stabilité anti wheeling et de freinage, mais une fois de plus, ne fonctionnait pas très bien dans les courbes rapides.

Que ce soit en termes de moteur, freins, pilotage, mais aussi aérodynamique, en compétition, tout est histoire de compromis !