À bien des égards, l’édition 2006 du Grand Prix de Valence (dernière manche du championnat) peut être considérée comme l’une des courses les plus surprenantes de l’ère moderne.
En arrivant sur le circuit Ricardo Tormo, à Valence, le championnat est sur la ligne. L’année fut pour le moins étrange. Valentino Rossi, détenteur de la couronne mondiale depuis 2001, est en difficulté. Ce dernier connut une année minée par les problèmes, ainsi que par la malchance. Entre blessures et problèmes techniques en tout genre, il n’a jamais su prendre de l’avance au championnat, et ses statistiques en dents de scie en témoignent : cinq victoires, cinq podiums mais beaucoup d’abandons et de contre-performances.
Nicky Hayden, son rival pour le titre affiche une belle régularité (sept podiums), mais « seulement » deux victoires. Avoir du mal à concrétiser et vaincre n’est pas de bonne augure face à « The Doctor », un monstre en la matière.
Lors de l’avant dernière manche au Portugal, tout est retourné : Hayden se fait faucher au pire des moments par son propre coéquipier Dani Pedrosa dans une manœuvre restée célèbre. Le premier abandon de la saison pour l’Américain n’arrive pas à point nommé. Valentino termine lui à un cheveux (deux millièmes) de Toni Elías, dans un finish lui aussi inscrit au panthéon.
Tout est remis en jeu pour Valence. Lors de la dernière course, les enjeux ne sont plus les mêmes. La pression est différente. C’est soit on gagne, soit on rentre à la maison. L’italien arrive sur les terres espagnoles avec une petite avance de huit points.
Lors des qualifications, la messe semble dite. Rossi prend la pole position, et nous rappelle qu’il ne faut pas l’enterrer si facilement. Il n’a besoin que d’une deuxième place pour gagner le titre, et cela semble à la portée du septuple champion du monde. Nicky Hayden ne rassure personne : il ne part que cinquième sur la grille alors qu’il a besoin d’une performance XXL.
Mais contre toute attente, lorsque les feux s’éteignent, Valentino Rossi rate complètement le départ. Il tombe immédiatement à la septième place, manquant de s’accrocher avec Dani Pedrosa. Les efforts du samedi étaient perdus. Il faut recommencer. En poussant au maximum, Rossi commet l’irréparable dans le cinquième tour. Ce dernier perd l’avant dans le deuxième virage, tout seul.
Une erreur qui coûte un titre. Nicky Hayden n’a plus qu’à assurer pour prendre la couronne mondiale, et n’a pas à terminer premier. D’ailleurs, qui était premier ? Capirossi ? Pedrosa ? Même pas …
C’était ni plus ni moins que Troy Bayliss, alors en remplacement de Sete Gibernau. l’australien est un des virtuoses de notre sport. Doté d’une vitesse naturelle hors norme, il s’était créé un trou en Superbike, s’affirmant comme l’un des hommes les plus forts de la catégorie au début des années 2000. Champion du monde WSBK en 2001, il avait décidé de passer le pas vers le MotoGP en 2003.
Mais le « baylisstic » peine à tirer le meilleur d’une Ducati Desmosedici GP3 difficile. Ceci dit, il arrive à scorer trois podiums. Passé chez Honda, il galère toujours autant avec des machines qui ne lui conviennent pas. Entre blessures et mauvais résultats, il décide de revenir en Superbike pour l’année 2006.
Il sera absolument intouchable cette année là. Troy domine complètement la catégorie WSBK. Vainqueur du championnat pour la deuxième fois, il est appelé par le team MotoGP Marlboro Ducati pour un remplacement. Sete Gibernau est diminué de ses blessures multiples, et le missile baylisstic répond présent.
Dès les qualifications, quelque chose cloche. L’australien, qui n’a pas piloté de machine de Grand Prix depuis un an, se qualifie deuxième devant son coéquipier Loris Capirossi. Il fait sensation. Une fois la course lancée, il est inarrêtable. Dans le plus pur style de Bayliss, il vient remporter ce Grand Prix haut la main, collant plus d’une seconde à « Capirex ». L’exploit est fou est n’a pas encore été réitéré depuis.
Rares sont les sports a pouvoir offrir autant d’émotions sur le même week-end. Un pilote wildcard vainqueur, et un dénouement final complètement dingue, voyant le « Kentucky Kid » sacré, en larmes et congratulé par Rossi. Ces images mythiques ne nous sont offertes que par les plus grands circuits, et il est certain que personne n’oubliera ces joutes sur le tracé valencien.