Parlons MotoGP : Ducati vient (encore) de se renforcer

On s’en doutait, et c’est désormais officiel : Fabio Di Giannantonio sera pilote chez Ducati VR46 en MotoGP l’an prochain, équipé d’une Desmosedici GP25. Ce contrat court sur deux ans et fait de « Diggia » l’un des futurs éléments clés de la firme de Borgo Panigale, car il sera le seul à bénéficier d’une machine d’usine sans être dans l’équipe officielle. Quelles seront les répercussions d’une telle signature ? Quel bilan en tirer ? C’est parti pour une petite analyse.

 

Deux parties gagnantes

 

Je ne vais pas revenir sur le talent de Fabio Di Giannantonio dans cet article, car j’ai eu l’occasion d’écrire sur lui à de maintes reprises depuis le début de la saison. Pour référence, je le trouve admirable à plus d’un titre, et parmi les meilleurs sur la grille actuellement. Forcément, il est le grand gagnant de cette prolongation, cela va de soi. La GP25 était son objectif – et il y a un an, son rêve, et le voilà maintenant qui pourrait figurer dans la course au titre mondial 2025. Son destin a changé en un claquement de doigts.

 

 

De l’autre côté, Ducati VR46 peut se réjouir également. Les troupes de Valentino Rossi bénéficient de la seule GP25 non-officielle sur le plateau, et deviennent, par le fait, une sorte de second team d’usine comme l’est Pramac Racing actuellement. Au vu des résultats de cette dernière formation, c’est un statut privilégié. Surtout quand l’on connaît les qualités de management de Gresini Ducati, qui, avec ses bilans récents, pouvait légitimement espérer la GP25 également. Sauf surprise, le cadeau de la maison mère s’apparentera donc davantage à un diamant espagnol du nom de Fermin Aldeguer.

C’est gagnant-gagnant, ça peut marcher, vaincre, même, et aller disputer le podium du général.

 

Ducati sera plus fort

 

J’ai l’impression que beaucoup ne mesurent pas l’importance des différents coups de Ducati durant ce mercato. Maintenant que tous les postes les plus intéressants sont attribués, je pense pouvoir affirmer que les Italiens sont ceux qui s’en sortent le mieux, peut-être à égalité avec KTM qui se renforce également.

 

 

Comparons simplement. Au lieu d’avoir huit motos sur la grille, Ducati n’en aura plus que six, d’accord. Le futur trio équipé de machines d’usine n’aura rien à envier au quatuor actuel. Pecco Bagnaia et Marc Marquez dans la même équipe, pour commencer. Tout simplement le futur meilleur équipage sur la grille. Puis, Fabio Di Giannantonio en support ; d’accord, ce n’est pas Jorge Martin, mais c’est à mon sens plus pertinent de le développer, à ce stade, qu’Enea Bastianini. Il a montré qu’il était capable de rivaliser avec les meilleurs malgré un matériel moins performant. Surtout, il s’est adapté aux conditions, et a bien rebondi, ce qui a parfois manqué à « Bestia ». L’autre Ducati VR46 sera sûrement pour Morbidelli, mais vous comprendrez aisément que ça ne change pas grand-chose à la hiérarchie.

Luca Marini, ex-pilote Ducati VR46, affirmait après le Grand Prix de Grande-Bretagne que la compétition sera plus intéressante avec deux Desmosedici en moins. Sur ce point, je pense qu’il a tort. Premièrement, seules trois Ducati ont marqué des points pour le championnat constructeur cette saison lors des Grands Prix. Celles de Bastianini, Martin et Bagnaia. Pas une de plus. Le top 5 sera peut-être plus disputé, d’accord, mais je ne vois pas pourquoi il y aurait de grosses différences pour le podium comparé à 2024. Ducati est sur une série de sept courses consécutives avec trois Ducati aux trois premières places le dimanche, un nouveau record. Si c’était quatre au lieu de sept, pourrait-on parler d’un intérêt supplémentaire ? Je ne crois pas.

 

 

Deuxièmement, je pense que l’écart entre la GP25 et la GP24 sera encore plus important que celui qui sépare la GP24 de la GP23, et il est déjà plus grand que par le passé. Ducati s’est suffisamment tiré de balles dans le pied en donnant de très bonnes machines à tout le monde. Oui, ça sert la domination de la firme, mais ça crée de l’envie, des tensions, et des moments dont ils se seraient bien passés. Je repense logiquement à tout l’imbroglio autour de Jorge Martin, qui, parce qu’il avait joué le titre à moto égale avec Bagnaia, était légitime pour le guidon officiel. Mais d’un autre côté, Bastianini aussi pouvait prétendre à sa propre succession, car lui aussi avait gagné. Marquez, l’heureux élu, n’a pas démérité non plus, et ainsi de suite. Avoir trop de bons pilotes, c’est à la fois diminuer les chances de victoire de l’écurie officielle, mais aussi se mettre des bâtons dans les roues un peu inutilement au vu de l’avance dont jouit Ducati sur les autres constructeurs.

J’avais prédit, après la deuxième place de Martin en 2023, que l’équipe Lenovo Ducati allait davantage se recentrer sur elle-même, et que la différence entre la GP23 et la GP24 allait être plus grande. Bingo. Pour la même raison, je pense que Tardozzi et ses hommes ont clairement désigné Marquez, Bagnaia et Di Giannantonio comme les fers de lance. En avoir trois au lieu de quatre, c’est rassembler ses forces, et plus souvent faire gagner ses favoris. Un Marquez qui triomphe fréquemment, c’est vendeur, tout comme un « Diggia » qui se fait gentiment une réputation en Italie. Le « diviser pour mieux régner » est inutile quand on domine déjà de la sorte.

Après, c’est un pari, car je pars du principe que la GP25 sera encore plus redoutable, comme s’il était aisé de faire une moto si performante… et espérer que les autres ne fassent pas de même. Mais au vu de ce que Ducati propose cette saison, je peine à imaginer autre chose.

Je suis curieux de savoir ce que vous pensez de cette manœuvre ? Dites-le moi en commentaires !

 

 

Photo de couverture : Michelin Motorsport