Depuis hier, Parlons MotoGP se penche sur le transfert de Marc Marquez. Dans un article que je vous recommande de lire en cliquant ici, je reviens sur la situation du point de vue de l’Espagnol. Aujourd’hui, concentrons-nous plutôt sur celle qui concerne Ducati, pas loin de jouer avec le feu. L’association de deux individus si forts n’est pas sans risques, mais peut rapporter gros.
Marquez plutôt que Martin ?
Marc Marquez rejoindra l’équipe d’usine Ducati dès la saison prochaine, contre toute attente. En effet, on voyait davantage Jorge Martin, qui a gentiment patienté chez Pramac Racing depuis 2021. On avait déjà parlé de son accession au poste de pilote d’usine en 2022, mais il avait été mis en concurrence avec Enea Bastianini, simplement plus fort sur ce seul exercice. Ensuite, fin 2023, il aurait pu mériter la promotion après sa saison XXL, mais ses employeurs conservèrent Enea Bastianini en raison de son exercice tronqué.
Et finalement, au cours d’un week-end fou où l’on a d’abord annoncé Jorge Martin aux côtés de Pecco Bagnaia pour les années à venir, le vent a tourné. Martin a communiqué le premier sur sa signature avec Aprilia, mais il n’en reste pas moins le dindon de la farce. Finalement, toutes ces années auront été vaines, alors que sur le pur plan de la performance, il méritait largement ce guidon, ça ne fait aucun doute. Ceci dit, il n’a aucunement été lésé et ne devrait pas l’être jusqu’à la fin 2024 d’après Ducati. La souplesse de la firme, qui a laissé le client Pramac lui chercher des noises jusqu’au dernier Grand Prix de la saison 2023 montre qu’il a bénéficié de conditions optimales pour s’exprimer. Mais ce n’est pas la question, le statut n’est pas le même.
Sur la piste, il a été meilleur que Marc Marquez. Ce dernier n’a jamais terminé une course dominicale avant lui, et figure 35 points derrière au classement général. Que ce soit en Sprint, en qualifications ou en GP, le « Martinator » est le meilleur des deux actuellement. La machine joue son rôle, d’accord, mais Marquez lui même a reconnu que Martin – et Bagnaia – étaient au-dessus pour l’instant. Mais Martin vient d’être vice-champion du monde, alors que Marquez sort d’un marasme sans nom chez Honda.
On pourrait croire que la promotion de Marquez est imméritée, et d’ailleurs, je l’ai lu sur les réseaux sociaux. Mais une équipe ne peut pas se tromper en choisissant Marc Marquez, l’un des meilleurs pilotes de tous les temps. Cela ne peut constituer une erreur à proprement parler.
Problème de riche
Ai-je réellement besoin de citer les raisons qui ont pu pousser Ducati à signer Marquez tant elles sont nombreuses et évidentes ? D’abord, du point de vue sportif. L’Espagnol est le premier des pilotes Desmosedici GP23, et le seul qui a été capable, jusqu’à maintenant, de les faire rivaliser avec les redoutables GP24. Il a été l’auteur de courses magnifiques comme à Jerez et au Mans, et même, réfléchies par dessus le marché. Ce qui n’était pas gagné avec un tel matériel entre les mains. Marquez n’est pas aussi flamboyant que je l’imaginais mais bien plus fort, solidement ancré dans le top 4 au classement général. Peu importe les conditions, le profil du tracé ou les adversaires du jour : il est toujours dans le coup.
Le côté extra-sportif n’est pas à négliger. Même s’il y a quelques conflits de sponsors, avoir Marc Marquez dans son équipe – et le mettre en position de gagner – est l’assurance d’une publicité énorme, dont l’impact dépassera toujours les stratégies de communication mises en place pour le discret Pecco Bagnaia.
Une association risquée ?
Parlons cohabitation. Depuis trois semaines, on entend, régulièrement, parler de l’intégration de Marquez au sein de l’équipe. J’ai un avis arrêté sur ce point : peut-être que cela se passera mal, mais en tout cas, ça va marcher.
Après la promotion de Bastianini début 2023, j’avais loué l’esprit de Ducati qui avait la ferme intention de composer un « duo dynamique » (ou power duo en anglais), un binôme capable de fulgurances sur toutes les manches. Plus généralement, c’est l’association de deux pilotes rapides, explosifs, au profil d’attaquants et sur une très bonne moto. Ils sont rares de nos jours, certes, mais Ducati n’a pas eu froid aux yeux pour en composer un il y a peu. À cause de la blessure de « Bestia », on a jamais pu le voir à l’œuvre. À l’époque, c’était la seule équipe de ce style sur la grille, mais aujourd’hui, KTM est en train d’en former un deuxième avec la paire Binder/Acosta.
L’étude des power duos dans l’histoire des sports mécaniques nous apprend deux choses. Premièrement, ils peuvent partir au clash. En construisant autour de deux monstres très rapides, la probabilité qu’ils se rencontrent souvent aux avant-postes est accrue. Et donc, cela peut se traduire par des accrochages, ou pire, des attaques verbales dans la presse. Prenons le cas du duo dynamique le plus impactant du XXIe siècle, à savoir, Lorenzo/Rossi chez Yamaha. Ce n’était pas toujours facile en raison de l’ego des susnommés, et cela conduisait rarement à l’entretien d’une atmosphère saine au sein de l’équipe. Je pourrais illustrer cet argument avec la paire Hamilton/Rosberg chez Mercedes en Formule 1, ou Senna/Prost par exemple. Oui, ça peut mal se passer.
Mais le deuxième point efface le premier. Ces associations sont toujours payantes. Reprenez les noms cités plus haut, et allez voir leurs palmarès lorsqu’ils étaient ensemble. Même quand l’entente n’est pas cordiale, ça gagne. En général, ils se tirent vers le haut, se forcent à se surpasser. L’idée que les deux se saborderaient uniquement pour des raisons d’ego n’est basée sur aucune situation passée. Tous les duos avec des profils de ce type ont fini par s’imposer, a minima, quand ils ne marquent pas l’histoire du sport en question.
Conclusion
Prendre Marquez, c’est un bon choix. Point. Peu importe qui le prend, la moto, le package, l’ambiance. Certes, Martin le méritait plus du point de vue sportif, mais ni lui, ni Bagnaia, ni Aleix Espargaro ou aucun autre ne rivalise avec l’aura de l’octuple champion du monde.
Ducati crée l’une des équipes les plus terrifiantes de l’histoire ; un nouveau duo dynamique qui devrait s’imposer, sauf surprise. Il y a des risques, oui, et l’équipe d’usine affaiblit Pramac Racing par la même occasion. Mais quand l’opportunité de signer Marc Marquez se présente, ces considérations sont secondaires. Cependant, ils nécessiteront une très bonne gestion afin que les deux travaillent dans le même sens. Les pilotes ne vont pas se faire de cadeaux. Même s’ils occuperont les podiums, ils vont d’abord penser à battre leur vis-à-vis plutôt qu’à faire avancer l’équipe.
Selon vous, Ducati est-il gagnant ? Dites-le moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.