Arrivé à Portimao pour le Grand Prix MotoGP du Portugal, Aleix Espargaro s’est épanché devant la presse d’un manque d’explication concernant le mauvais feeling qu’il avait eu avec son pneu Michelin lors du GP du Qatar.
Pourtant, à peu près au même moment, et sans doute même un petit peu avant, Michelin avait tenu une réunion avec les techniciens Aprilia pour leur faire part de leur étude de la situation. Manque de communication interne dans l’équipe de Noale ou simple timing malencontreux, finalement peu importe, l’explication étant bien là et confirmant même les propos du pilote catalan. Mais il y avait bien une raison !
Nous avons contacté Piero Taramasso, manager de la compétition deux-roues de Michelin, qui a eu la gentillesse de nous en partager la synthèse…
“En vous lisant, j’ai été surpris parce qu‘en fait on a fait déjà des retours à Aprilia. On peut déjà faire un retour assez rapidement sur certains paramètres après la course. Et puis hier, on a fait quand même un grosse réunion technique où on a présenté notre rapport à Aprilia, avec tout le staff. C‘était au moins 20 pages. Car on a eu une personne qui a travaillé pendant 3 jours dessus, et on a analysé les datas données par Aprilia. Donc en analysant ces datas, des numéros et des chiffres que tu ne peux pas interpréter, pour faire court le constat final est simple. Le ressenti d’Aleix, qui est un pilote que je respecte beaucoup, est justifié. Son ressenti, c’est exactement ce qu’il s’est passé: il avait peu de feeling, il avait très peu de grip à la course du Qatar. Et la raison est simple; son pneu était froid ! En fait, il n’était pas chaud, il était au moins 10° plus froid par rapport à tous les autres pilotes de la grille. Le pneu arrière médium qu’ils ont utilisé au Qatar c’est le pneu le plus dur, le plus rigide de notre gamme. Donc ces pneus là si tu démarres avec une température qui n’est pas au niveau, surtout avec au moins 10° de moins, c‘est vraiment très très très difficile de le faire fonctionner. C‘est pour ça qu’il a eu du mal au départ, il a eu du mal à le faire monter en température, et il a mis longtemps pour arriver à des chronos disons corrects. Il fait quand même son meilleur tour à 2/10 du meilleur tour en course, et comparé au meilleur tour qu’il avait fait en sprint, il était à 6/10., et si tu regardes c’est le même écart qu’avaient les autres pilotes: par rapport aux meilleurs chronos du sprint, tout le monde a roulé 5 ou 6/10 plus lent. Donc il était en ligne avec les autres, sauf qu’au départ il a mis beaucoup de temps à le mettre en température parce qu’il est parti plus bas. Et ça, ça n’aide pas. Les pneus, il n’y a pas de secret: si tu n’as pas de température, tu n’as pas de pression, et le pneu ne peut pas travailler correctement. C’est ça qui a causé disons la performance moindre que ce à quoi ils attendait. Bon, il finit quand même 8e. Comme tu as vu, les pneus étaient très constants. Bagnaia a fait des super chronos, Martin a fait le meilleur best à la fin de la course. Probablement, ce qui a beaucoup joué, c‘est la procédure de départ en 2 fois. Là, visiblement, les pneus ont perdu de la température et après ils n’étaient pas prêts. Donc pour moi c’est aussi simple que ça, Aprilia est au courant, Aleix est au courant aussi. Et chaque fois qu‘on a des remarques des pilotes, on fait notre analyse, et ça nous coûte des jours de travail mais on essaie d’être le plus objectif possible. Après on fait toujours un retour au pilote et au team. »
Une fois de plus, le « mystère » est donc résolu, mais cet épisode est intéressant car il illustre parfaitement qu’un pilote qui accuse ses pneus peut tout à fait être de bonne foi, sans pour autant que ses pneus ne soient coupables de quoi que ce soit…