La situation des deux constructeurs japonais au soir du premier jour du Grand Prix de Catalogne a été tellement catastrophique que tout le paddock a décidé de se pencher sur leur chevet. Les commentaires des pilotes étaient édifiants sur l’ampleur du désastre et la tendance veut que la débâcle Honda émeuve plus que le marasme Yamaha. Chez Ducati et chez Aprilia, on s’est confirmé comme ouvert à la discussion sur les nouveaux points de concession qui leur seraient accordés pour remonter la pente, au contraire de KTM qui reste fermé, mais qui joue aussi une partie personnelle avec Dorna sur l’échiquier MotoGP. Cependant, l’objectif à présent est de convaincre Honda et Yamaha de rester, car personne ne doute du fait que les états-majors japonais ne supporteront plus encore longtemps une telle humiliation sur la scène mondiale à chaque Grand Prix.
Car la question à présent posée est celle qu’avait évoqué Livio Suppo cet hiver : « pourquoi les constructeurs japonais devraient-ils dépenser de l’argent et passer aussi pour des imbéciles ? ». En attendant la réponse, voici les commentaires bien sentis des pilotes Honda sur leur situation. On a déjà entendu Marc Marquez, mais les paroles de Joan Mir comme de Taka Nakagami sont aussi édifiants. Le pilote Repsol Honda a ainsi précisé au terme du vendredi passé sur le tracé de Montmelò : « la situation est tout aussi désespérée qu’en Autriche, et on s’y habitue, on s’y habitue… La situation est horrible, je perds beaucoup de temps et je reste coincé. Je roule deux secondes plus lentement que l’an dernier. Je veux comprendre que je suis pareil ».
Taka Nakagami ajoute : « tous les pilotes Honda disent la même chose : il y a un manque d’adhérence. Mais l’ampleur des problèmes est incroyable. Je n’arrivais pas à tourner. J’ai mis du gaz correctement. J’ai immédiatement commencé à tourner et la moto est devenue instable. Nous ne pouvons pas prendre de vitesse et sommes beaucoup plus lents que l’année dernière si l’on compare les temps de la seconde séance d’essai ».
Aleix Espargaró : « la situation des Japonais me rend très triste »
Dans le cas de Nakagami, il s’agit de 0,630 seconde sur la base des deux séances de l’après-midi. A titre de comparaison : le pilote Aprilia Aleix Espargaró, leader de la première journée catalane est 0,716 seconde plus rapide que l’an dernier… Ce dernier commente d’ailleurs la conjoncture japonaise : « ça me rend très triste. Je suis un super fan du Japon, de la culture japonaise. Un amoureux de Suzuki. Je pense que je suis là où je suis grâce à Suzuki et aux Japonais. Et ça me rend très triste. Ils soutiennent le Championnat depuis toujours et je suis extrêmement favorable, même si mes patrons ne le sont peut-être pas, au retour des points de concession. Et qu’ils reviennent aux avant-postes, car nous avons besoin d’eux en Championnat ».
Justement, le championnat… Gigi Dall’Igna, patron de Ducati Corse rappelle l’impératif : « c’est dans l’intérêt du championnat d’avoir un équilibre entre les constructeurs. Je suis favorable à l’aide aux constructeurs qui ont des problèmes. Parce que s’ils décidaient de quitter le MotoGP, ce serait un problème. Nous devons prendre des décisions judicieuses. Pour moi, ce serait bien si les Japonais avaient plus de jours de test. Peut-être pourrions-nous même leur offrir une amélioration aérodynamique supplémentaire par saison ».
Dall’Igna a également expliqué qu’accorder un moteur supplémentaire n’aiderait pas : « je ne pense pas que ce soit important pour eux. Il est plus important qu’ils bénéficient de plus de liberté et d’opportunités de développement. Pour s’améliorer, ils ont besoin d’options qui ne sont pas autorisées aujourd’hui. Nous avons besoin d’une réglementation qui donne aux usines en difficulté une marge de manœuvre pour des améliorations techniques ». La porte est ouverte, mais les Japonais vont devoir aussi se remettre en question. Car on ne sauve jamais personne malgré lui, même en MotoGP.
