Toprak Razgatlioglu n’aborde pas cette saison de WSBK dans la meilleure forme psychologique. Une situation qui n‘est pas en rapport avec la situation technique de sa Yamaha. Elle est liée en revanche à la situation actuellement dramatique de son pays touché par une catastrophe naturelle ayant fait de nombreuses victimes. Le Champion du Monde de la catégorie réservée aux machines de série n’a pas fait que regarder les images à la télévision. Il est allé aider sur place et il a vu les dégâts, il a aidé et il a partagé les efforts des secouristes comme le rame des victimes. Un moment qui l’a impacté. Et c’est dans cet état d’esprit qu’il se présente sur la ligne de départ de Phillip Island.
Toprak Razgatlioglu n’aura pas que ses soucis concernant la Yamaha dans cette épreuve inaugurale de la saison 2023 du WSBK qui se jouera en Australie. Une contrée très éloignée de ce qui mine actuellement le mental du pilote de la R1 et qui est la situation que subit son pays, la Turquie. Depuis le 6 février, il y a eu plusieurs tremblements de terre dans le sud-est de la Turquie et le nord de la Syrie, dont la force varie de 5,8 à 7,7 sur l’échelle de Richter, c’est-à-dire de modéré à fort à important. La dévastation est indescriptible, selon les chiffres officiels, des milliers de personnes ont perdu la vie.
Une catastrophe qui mobilise toute l’énergie du protégé de Kenan Sofuoglu : « après le premier tremblement de terre, personne ne savait ce qui se passait », a déclaré le champion du monde de Superbike 2021 à Speedweek. « Le lendemain, tout le monde s’est rendu compte qu’il s’agissait d’un fort tremblement de terre. Le premier était à 7,7, neuf heures plus tard, il y avait un deuxième à 7,6 – c’est vraiment fort ». Toprak s’est totalement mobilisé pour aider ses compatriotes : « j’ai parcouru les 1 000 kilomètres jusqu’à la zone du tremblement de terre dans un fourgon, nous avions deux générateurs de secours et des câbles avec nous, car il n’y a plus d’électricité là-bas ».
Toprak Razgatlioglu : « j’ai réalisé l’impact psychologique que la situation avait sur moi, j’essaie d’oublier ce que j’ai vu«
Une fois sur place, il n’a pas ménagé ses efforts : « nous sommes restés deux jours, avons dormi dans la voiture et avons essayé d’aider. Nous n’avons dormi que deux ou trois heures car nous ne nous sentions pas fatigués. Nous avons vécu une très mauvaise situation, beaucoup de gens sont morts. Tout dans la zone est détruit, c’était la première fois que je voyais quelque chose comme ça. En 1999, quelque chose de très similaire s’est produit dans ma ville natale de Sakarya, mon père et ma mère en ont été témoins. A cette époque la terre tremblait avec 7,4 ».
Puis il ajoute : « il faut voir quelque chose comme ça dans la vraie vie pour le comprendre. Je n’y suis resté que deux jours parce que j’ai réalisé l’impact psychologique que la situation avait sur moi. Certaines personnes ont attendu que les membres de la famille enterrés soient récupérés des ruines. Quand je suis rentré, je n’ai plus allumé la télé. J’ai vu le malheur, je n’en ai pas besoin de plus. C’était vraiment mauvais. J’ai eu une semaine avant l’Australie et j’essaie d’oublier ce que j’ai vu ». Mais ce n’est visiblement pas facile : « la tragédie n’a qu’un seul avantage : normalement, il y a des affrontements et des combats constants entre les différents pays du monde. Cette fois tout le monde se serre les coudes et aide, c’est très bien et ça me fait plaisir. Tout le monde en Turquie essaie d’aider, c’est super » termine-t-il.