C’est la grande question qui sera débattue en WSBK pour savoir s’il faudra en faire une règle pour 2024. Il s’agit du poids minimum homologué en compétition en prenant en compte celui du pilote, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui où on ne considère que celui de la machine. Un sujet clivant s’il en est puisque les grands et lourds s’opposent naturellement aux petits et légers. Le sextuple Champion du Monde de la catégorie Jonathan Rea a donné son sentiment sur cet item et il diffère de ceux de Jorge Lorenzo et de Dani Pedrosa. Mais ce dernier réunit toutes les tendances avec ce constat qui fait l’unanimité : « si tu mets le poids minimum, ce n’est plus la même histoire la même » …
Le thème est une véritable croisade lancée par Scott Redding dont l’engagement n’est pas innocent. L’an passé, il essayait de rentrer sa grande carcasse derrière le carénage de la Ducati Panigale V4R devenue celle cette saison du frêle Alvaro Bautista qui pourrait y envisager presqu’une colocation… Mais c’est le résultat final qui exacerbe le plus les sentiments puisque l’Espagnol a réussi là où l’Anglais a échoué, soit la conquête du titre mondial en WSBK. Un moment attendu à Borgo Panigale depuis 2011 et la couronne de Carlos Checa.
Reste que la question de la prise en compte de la morphologie du pilote dans la détermination du poids minimal de l’homologation est à présent bien ancrée dans le paddock. Pour preuve cette réaction lue sur motorsport-total d’un Jonathan Rea, tout de même six fois Champion du Monde de la spécialité : « ça arrivera en 2024. Mais grâce à Alvaro, tout le monde veut que ça s’accélère » dit-il, se montrant volontairement provocateur. « Plus tôt cela arrive, mieux c’est » ajoute-t-il même. Et en cas de validation, cela se traduirait concrètement ainsi : les pilotes légers devraient alors transporter un lest précisément défini, en fonction de leur propre poids corporel, destiné à compenser les avantages en termes d’accélération et d’usure des pneumatiques.
L’officiel Kawasaki précise : « pour être honnête, j’essaie de rester en dehors de ça. Mon opinion n’a pas d’importance. Je dois me débrouiller avec ce que j’ai. Je suis un pilote plutôt de taille moyenne. Je ne suis ni particulièrement petit ni particulièrement grand. Mais Scott Redding est plus grand et lourd. Loris Baz est plus mince que jamais. Mais avec l’équipement, ils pèsent près de 100 kg. Ils ont un gros désavantage ».
« Pourquoi ils n’ont pas parlé de ça avant que Bautista ne gagne en WSBK ?«
Il termine néanmoins avec cette mention : « mais il faut aussi dire qu’Alvaro est le seul pilote à pouvoir faire ça. Rinaldi qui est aussi petit est également beaucoup plus rapide que moi dans les lignes droites, mais je peux m’accrocher à son aspiration et ne pas perdre trop de mètres en conséquence. Alvaro est un vainqueur de Grand Prix. Il a déjà beaucoup accompli. Rinaldi est bon, mais il n’est pas Alvaro Bautista. C’est pourquoi j’ai beaucoup de respect pour lui ».
Chez les vétérans du MotoGP, on est aussi intéressé par le sujet. Mais façon Grand Prix. Jorge Lorenzo se pose ainsi cette question : « ce que je dis c’est pourquoi ils n’ont pas parlé de ça avant que Bautista ne gagne ? Ils n’ont dit ça que lorsqu’il a gagné ». Le quintuple titré mentionne aussi Corsedimoto : « on ne peut pas mettre d’échasses à ceux qui ne sont pas assez grands, pour équilibrer. Chaque génétique est bonne pour un sport. Lorsque nous avons couru ensemble, s’il y avait peu d’eau, Pedrosa a bénéficié du faible poids car il pouvait moins user les pneus et avait une meilleure traction. Quand il pleuvait beaucoup, c’était l’inverse. Petrucci, qui pesait beaucoup, était numéro 1 ».
Justement, le mot de la fin revient à Dani Pedrosa : « si tu changes la règle du poids minimum, ce ne sera plus la même histoire, car le plus petit pilote doit compenser les kilos qui lui manquent. C’est déjà une différence physique importante de rouler sur une grosse moto ». Mais il n’est pas inquiet pour Alvaro Bautista : « il y a des pilotes qui ont fait différentes catégories et qui étaient petits même quand ils ont commencé. Mais ils ont quand même obtenu des résultats. Cela ne changera pas leur vie d’avoir plus ou moins de poids ».