Pecco Bagnaia a donné cette étrange impression cette saison d’être à fois friable et solide, égaré et déterminé, et ce n’est qu’à fin des hostilités que l’on sait véritablement rendu compte que son abord réservé n’était pas un mur de défense contre une pression qui l’écrasait, mais sa véritable nature, simple, au sens noble du terme. Son entame de saison ne l’a pas présenté sous son meilleur jour dont l’aube s’est levée au solstice d’été. A partir de là, il a rayonné, irradiant de son talent le championnat sans que rien ni personne ne lui fasse de l’ombre. Pour mieux comprendre, mais aussi le comprendre, il faut sans doute écouter son père Pietro…
Pietro Bagnaia est le père d’un Francesco « Pecco » qui peut à présent poser sur des photos avec son illustre ainé Giacomo Agostini. Car il est Champion du Monde de la catégorie reine des Grands Prix avec une moto italienne, du jamais vu depuis Ago qui a aligné les mêmes planètes de l’italianité en 1972. Mais avant d’en arriver là, Pecco en a fait du chemin. Avec la VR46 Académie, certes, mais aussi sa famille. Un sceau qui scelle, encore, le déroulé de sa carrière.
Dans des propos repérés sur crash.net, on découvre d’abord cette anecdote où tout s’est joué. Un moment où le ranch de Valentino Rossi était loin et le box Ducati à peine un fantasme. Pietro Bagnaia révèle ainsi : « avec Pecco, on s’est fâché qu’une seule fois. Je l’ai alors menacé d’arrêter quand il était enfant. Il y avait des parents qui se disputaient à propos de choses qui se passaient sur la piste parmi les enfants. Une scène décidément mauvaise et Pecco a été déçu, en partie parce qu’il était devenu nerveux au-delà de la limite et en partie parce que je m’étais tenu à l’écart de ce chaos que, franchement, j’ai trouvé déplacé ».
L’histoire de Pecco Bagnaia déjà sa morale et elle est belle
Il ajoute : « je ne sais pas s’il s’attendait à ce que j’aille me jeter dans la mêlée, mais je lui ai dit que si l’environnement était comme ça, et qu’il continuait à souffrir autant au lieu de penser juste à s’amuser, on changerait de sport ». Une réflexion clé car… « Il n’a plus rien dit et c’est la seule fois où j’ai dû élever la voix vers lui dans toute sa carrière ».
Pietro Bagnaia et la famille ont fait ce qu’il faut pour soutenir le fiston, mais le père ne parle pas de sacrifice, même si les temps ont été durs. Car l’investissement en ressources a été contrebalancé par le bonheur, toujours touché en dividende… « Nous avons fait des efforts comme nous devons toujours le faire, mais je ne peux pas parler de sacrifices. Peut-être avons-nous eu plus de chance que d’autres, mais je dirais que quand on voit un fils si heureux, si engagé et obstiné à faire ce qu’il aime, on n’a pas envie de parler de sacrifices » explique le pater familias bienveillant.
« Je pense pouvoir dire que je n’ai fait aucun sacrifice » insiste-t-il même avec cette plus-value : « c’est une histoire de famille, nous avons toujours été tous ensemble, c’était beau et le fait qu’aujourd’hui Pecco soit tellement lié à nous tous et aussi toujours à la recherche d’un environnement qui ressemble un peu à la maison est probablement la morale de cette histoire. La poussée est toujours venue de lui, c’est lui qui nous a tous entraînés. Cela signifiait être ensemble et s’amuser, l’avenir n’était pas vraiment envisagé, ou peut-être que seul Pecco y pensait avec sa détermination » termine-t-il. Vu comme ça, Pecco Bagnaia apparaît incontestablement sous un angle bien particulier qui explique aussi pourquoi Jack Miller l’avait autant à la bonne.