Cette belle saison 2022, comme toutes les autres, cache
son lot de statistiques intéressantes, qui, une fois analysées,
permettent de mieux appréhender l’environnement MotoGP.
Une en particulier est passée sous les radars alors qu’elle est
caractéristique de l’évolution de la catégorie.
Analyse.
En effet, cette saison, nous avons eu 10 polemen
différents, un record. Histoire de vous rappeler qui s’est
illustré le samedi, voici un bref résumé. Avec cinq unités, le
champion Francesco Bagnaia et Jorge
Martín sont les grands vainqueurs de ce championnat
parallèle. Derrière, nous retrouvons Johann Zarco,
avec deux. Aleix Espargaró fit de même en
Argentine et en Catalogne. Fabio Quartararo, plus
jeune poleman de tous les temps, en inscrit une en Indonésie. Dans
des conditions dantesques, Fabio Di Giannantonio
prit le meilleur de ses adversaires sur le Mugello, à la surprise
générale. Bastianini, deuxième meilleur performer
de l’année, réalisait le meilleur chrono à Spielberg, tandis que
Jack Miller l’imitait à Misano.
Marc Márquez, sans doute le meilleur poleman de
tous les temps, partait – encore – de la première place au Japon.
Finalement, Marco Bezzecchi ajoutait son nom à la
liste lors du rendez-vous suivant, en Thaïlande.
Mais qu’est ce que cela signifie ? Peut-on tirer des
enseignements de cette statistique ?
I) Tout le monde est rapide, et un nouveau type de pilote
émerge
Croyez-le ou non, ce simple fait veut dire beaucoup, sans doute
plus que vous ne le pensez. Le premier point est évident, mais
finalement révélateur ; tous les pilotes sont rapides. Avant, il
était rare de trouver des artistes du samedi, et ce pour plusieurs
raisons. Tout d’abord, la pole dépend énormément de la moto sur
laquelle on évolue. Si c’est difficile à croire, il moins aléatoire
de remporter une course que de faire la pole. Le plateau est
beaucoup plus homogène qu’avant – notamment
grâce (ou à cause) de l’ECU standardisé, et sur une
vingtaine de tours, tout peut se passer. Cela donna lieu à des
victoires surprises comme celles de Jack Miller à Assen en
2016, ou Brad Binder lors du
Grand Prix de Styrie 2021.
En revanche, faire la pole requiert une vitesse considérable,
d’autant plus qu’il y a toujours deux ou trois spécialistes qui se
les partagent toutes, ou presque. Il n’y a pas si longtemps, vous
pouviez parier sur Lorenzo et
Márquez sans risquer la banqueroute. Des fois,
Valentino Rossi ou Dani Pedrosa
venaient s’intercaler, mais globalement, la vitesse était moins
bien répartie. La MotoGP a changé. Désormais, une dizaine de
pilotes maîtrisent cet exercice autrefois difficile, notamment les
jeunes. Fabio Quartararo, Enea
Bastianini ou même Márquez sont les
parfaits représentants de cette école, toujours rapides quand ils
sont sur la moto.
Le deuxième point de cette première partie concerne le timing,
essentiel pour briller en qualifications. Tout le monde, ou
presque, peut faire un bon tour sur une séance de quarante minutes,
comme celles que les plus …sages d’entre nous (ça fait déjà
dix ans, on ne rajeunit pas) ont pu observer. Mais le plus
important, c’est de faire le bon tour au moment T.
Maintenant, une petite poignée de pilotes, menés par
Jorge Martín et Pecco
Bagnaia, peuvent, en un tour seulement, éteindre la
concurrence. Nous pouvons établir un lien avec la Formule 1, qui
impressionne par cette dimension. Sur quatre roues, tous les
pilotes de la grille peuvent se conditionner à faire, en un essai,
leur meilleur tour, sans aucune erreur. L’électronique ainsi que
l’évolution des pneumatiques permettent une vitesse de
conditionnement jamais vue auparavant ; c’est ce que nous
avons pu voir, notamment à Jerez et à Sepang.
Márquez, issu de l’ancienne école malgré ses 29
ans, n’a pas le même style. Parfois, il commet une erreur, doit
relancer un deuxième tour rapide dans la foulée pour finalement
rentrer. Certes, Bagnaia et Martín ne sont pas des robots, mais ils
ont montré à deux occurrences qu’il était possible de réaliser un
tour « Formule 1 » quasi-parfait en un
essai. C’est ce vers quoi la MotoGP tendra dans les années
à venir, c’est une certitude.
II) La Ducati, reine du samedi
Outre la vitesse intrinsèque de chacun, l’exercice de la pole est
très révélateur de la performance des motos, sans doute plus que
les courses. En 2022, les qualifications ont démontré que la
Desmosedici était encore plus forte qu’on ne l’imaginait. À
16 reprises, un pilote équipé de l’arme italienne a réalisé le
meilleur tour qualif’.
Ce n’est pas tout : Il s’agit de six pilotes différents, et leurs
profils respectifs révèlent d’autres informations intéressantes. En
effet, trois d’entre eux ne sont pas connus pour leur vitesse. Jack
Miller, avant Misano, n’avait réalisé aucune pole position depuis
le fameux Grand Prix d’Argentine 2018. Marco
Bezzecchi non plus n’est pas un spécialiste, mais
la Ducati lui permet de prendre confiance et d’engranger des tours
rapides. Avant Buriram, il avait réalisé quatre
pole en carrière, dont deux en Moto2 et autant en Moto3. La constat
est encore plus frappant dans le cas de Di
Giannantonio, en tête au départ une seule fois dans sa
carrière seulement, à l’occasion du Grand Prix de Saint Marin 2019
en Moto2.
Cela signifie donc que la Desmosedici, GP21 ou
GP22, est une moto avec laquelle il est plus aisé
de s’adapter, et qui permet, même pour des pilotes moins à l’aise
le samedi, de bien performer. Le fait que huit Ducati jonchent la
grille a certainement un rapport avec ce nouveau record.
Que pensez-vous de cette statistique ? Dites-le nous
en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport