Nouvelle course, nouvelle démonstration de Francesco
Bagnaia. L’italien est juste trop fort, trop aiguisé pour être
chahuté. Cette victoire est loin d’être comme les autres, et nous
allons découvrir pourquoi dans cette analyse en plusieurs
points.
I) Une science de la course digne des plus
grands
Pecco Bagnaia est un problème à plusieurs titres.
Après le weekend d’Assen, nous avions conclu qu’il
s’agissait de sa meilleure course en carrière. Puis nous avions
statué qu’il s’agissait de Misano. Et désormais,
Sepang. Aucun pilote, dans l’ère MotoGP, n’a
progressé autant en une demi-saison que l’Italien.
En Malaisie, il écœure la concurrence grâce à un
développement de course génial, osé mais chirurgical.
Parti de la neuvième place, il réalise un départ d’anthologie, le
« meilleur » de sa carrière selon ses dires. Il faut
savoir qu’à Sepang, l’enchaînement des virages n°1, 2 et 3 est très
technique et requiert une précision extrême.
Il n’est pas rare que les pilotes manquent le premier freinage à
plat, violent,
« typé » Formule 1. La piste est
large, nos héros peuvent arriver à plusieurs de front et la
difficulté réside dans le placement pour le virage n°2, qui
conditionne le n°3 et le bout droit suivant. Pecco s’est
littéralement joué de ces difficultés. Début de course parfait, ce
qui est assez rare. Certes, la chute d’un Jorge
Martín en mission a profité à Bagnaia, c’est un fait. Mais
le coup de maître ne faisait que débuter.
Rapidement, le quatrième duel
« Bestia »/Bagnaia de la saison se
profile. Si l’on fait les comptes, Bastianini a
vaincu au Mans ainsi qu’à Aragón,
mais Bagnaia est sorti vainqueur à Misano. Pour
Pecco, c’est le pire cas de figure. Enea n’a rien à perdre, est
l’un des pilotes (si ce n’est le) plus à l’aise sur sa machine, est
fougueux, assez imprévisible, et ne semble pas se préoccuper des
consignes d’équipe.
Mais la principale qualité de Bastianini reste son sens de
la course, sans doute plus développé que celui de Bagnaia.
Encore une fois, le leader du championnat ne commit aucune erreur
de jugement. Après s’être fait passer une première fois, il
attendit sagement son heure, et doubla au bon moment, sans se
précipiter, « à la Rossi ». Bastianini
ne put répondre franchement malgré les tentatives et la pression
constante qu’il fit subir à l’officiel Ducati. Du grand
pilotage.
II) Jorge Lorenzo-esque
Nous n’en avons pas encore parlé, et c’est peut-être le
plus incroyable. Bagnaia jouait un titre, dans sa
troisième saison en Grands Prix. Il s’agit de la plus grande
performance dans un moment de pression si intense depuis
Márquez à Valence en 2017. Il faut savoir que se
révéler dans de telles conditions, au moment où vous devez gagner
est on ne peut plus difficile.
L’histoire nous l’enseigne. Valentino Rossi lui-même
peinait à faire de même. Que ce soit à Valence
2006 où à Phillip Island 2015, dans
des situations tendues, Vale avait du mal à répondre présent. Marc
Márquez, en 2013, s’était contenté de la troisième place à Valence
et s’était mis en difficulté à Phillip Island, pilotant
fébrilement, normal pour son jeune âge à l’époque.
Jorge Lorenzo, le roi des performances « dos au
mur », répondait toujours présent quand la pression
était insoutenable. Phillip Island 2013 ?
Victoire malgré une course flag-to-flag tortueuse. Valence 2013,
victoire impérative pour espérer remporter le titre ? En
résulte l’une de ses meilleures prestations en carrière.
Nous reviendrons sur ce point inhérent à la carrière de
« Por Fuera » dans un article dédié.
Le rapport avec Bagnaia est clair. Arriver à
réaliser des performances similaires à seulement 25 ans est tout
simplement bluffant, et laisse rêveur quant à son potentiel
maximal. Il avait tout à perdre, mais a quand même pris des
risques pour la victoire. Nous devons rendre hommage à sa
maturité et son envie, qu’il soulève le trophée 2022 ou non
d’ailleurs.
Qu’avez-vous pensé de sa course ? Dites-le-nous en commentaires !
Photo de couverture : Michelin Motorsport