Moto3 Interview exclusive de Florian Chiffoleau (chef d’équipe de Marco Bezzecchi) « On s’est bien battus jusqu‘au bout »

Après s’être fait percuter par Enea Bastianini en Thaïlande, puis Gabriel Rodrigo en Australie, Marco Bezzecchi a vu son avance au Championnat du Monde diminuer de 1 point après Motegi à 12 en arrivant à Sepang. La situation à deux courses de la fin (dont Valence le 18 novembre) était difficile, mais pas désespérée.

Jeudi dernier, Valentino Rossi a déclaré au sujet de son pilote Bezzecchi de la VR46 Riders Academy « Marco est une énorme surprise, il a fait un gigantesque pas en avant. Il devra faire tout son possible pour garder ses chances de garder le Championnat ouvert jusqu’à Valence, car dans la dernière course tout peut arriver ». Avez-vous ressenti, Marco et toi, ses paroles comme une pression supplémentaire ou un encouragement, un soutien ?

« On a ressenti ça plutôt comme un encouragement parce que Marco n’avait pas trop la pression. Je ne l’avais pas non plus de mon côté, car dans notre position avec 12 points de retard, il fallait tout donner pour les rattraper. C’était donc plutôt un encouragement, et pour Marco une sorte de booster, destiné à accroître sa motivation. »

Lors des qualifications, Bezzecchi a débuté son dernier tour chrono deux secondes avant le drapeau à damier. N’était-ce pas jouer un peu avec le feu ?

« Ça a été réellement très tendu ! La stratégie effectivement était de passer peu de temps avant le drapeau à damier, mais pas dans un laps de temps aussi court. Nous avons eu un petit problème pour démarrer la moto, ce qui nous a fait perdre environ entre dix et quinze secondes. S’il avait démarré normalement, ça nous laissait largement de quoi passer. Malheureusement la moto a eu du mal à démarrer, et il est vrai que pour passer à temps avant le drapeau à damier, ça a été très tendu. »

Marco s’est classé deuxième des qualifications derrière Martin, à 0.03 de l’Espagnol, sans bénéficier d’aspiration. Ça ne l’a pas trop pénalisé, manifestement. Pourtant ne dit-on pas que l’aspiration est indispensable en Moto3 ?

« C’est vrai qu’il a réalisé là un tour véritablement impressionnant. Il avait des pilotes devant lui en ligne de mire, mais avec un écart trop grand pour qu’il puisse bénéficier de leur aspiration.

« Nous avons tous été véritablement ébahis par son tour parce que le chrono était vraiment très rapide et sans aspiration, d’où une perte de temps logique. On estimait à plus de trois dixièmes la différence s’il y avait eu une aspiration. Ça aurait pu nous aider effectivement beaucoup. On pensait s’insérer dans un petit groupe, mais nous n’avons pas pu en bénéficier quand la moto a eu du mal à démarrer.

« Mais Marco a fait un travail absolument incroyable lors de ces qualifications parce qu’il a réalisé un deuxième chrono impressionnant. A Phillip Island par exemple, où il n’y a pas de longue ligne droite, mais du vent et des virages rapides, l’aspiration aide vraiment énormément, surtout avec de petites motos qui ont peu de puissance. »

Vidéo : Début du warm up

En début de course, la lutte s’est avérée serrée entre Bezzecchi premier et Martin cinquième, l’Espagnol n’ayant alors plus que deux points d’avance au classement provisoire du Championnat ?

« Oui, c’était très serré. Ça a été une course très mouvementée, avec un beau combat au début. J’ai été encore une fois déçu de Darryn Binder qui a effectué sur Marco un dépassement pas très propre… »

… c’est d’autant plus étonnant qu’il est également pilote KTM.

« Oui voilà, en tant que pilote KTM en plus. Ça fait plusieurs choses comme ça qui depuis deux ou trois courses me surprennent et me déçoivent. En tout cas, il y a eu effectivement un beau début de course. »

Vidéo : Darryn Binder dans ses œuvres :

Jorge Martin 8e était strictement à égalité de points avec Bezzecchi (avec un total de 223) à 11 tours de la fin. Le Championnat repartait-il en quelque sorte à zéro ?

« Oui, effectivement, à ce moment-là de la course, tout restait à faire jusqu’à la course de Valence. Si le Championnat s’était joué sur une seule course, ça aurait été beau. Mais malheureusement cela ne s’est pas passé ainsi puisque en fin de course Martin s’est échappé, et on a été gêné par Arbolino et Dalla Porta qui ont fermé les portes, et Arbolino a poussé une fois de plus Marco.

« Donc on est resté bloqué et il a été impossible de récupérer le temps dans le dernier tour car Martin avait creusé un écart trop important. »

Quel est ton bilan final de cette année ?

« Cette saison a été très intéressante et passionnante, avec beaucoup d’émotion car en dents de scie, avec une succession de victoires et de chutes, que ce soit pour Martin ou pour Marco.

« J’avais dit en début de saison que j’espérais que Marco pourrait terminer dans le top 7 du Championnat. A l’issue des deux ou trois premières courses, on s’est rendu compte que son niveau était vraiment bon, meilleur que ce qu’on supposait en début d’année. Nous avons eu ensuite des exigences un peu plus élevées pour se battre pour le titre. C’était vraiment impressionnant.

« On est contents parce que ça a été une belle saison, mais en même temps déçus car lors des 4 courses outremer, lors de 2 d’entre elles ce sont des adversaires qui ont fait chuter Marco à terre. Ça a fait deux courses avec 0 point. Malheureusement, c’est quelque chose qu’on ne peut pas contrôler. Ça fait partie de la course, on n’y peut rien.

« Ce qui est dommage, c’est que si Marco avait pu marquer des points lors de ces deux courses, même si ce n’étaient pas des victoires, le Championnat aurait été plus intéressant. Il aurait été bien de se battre jusqu’à la fin, jusqu’à la course de Valence. Ça a quand même été un Championnat magnifique. »

Photos et vidéos : PruestelGP et motogp.com / Dorna