Face aux enjeux écologiques, la propulsion hybride thermique-électrique est incontestablement dans l’ère du temps. Aujourd’hui, tous les constructeurs automobiles offrent une gamme hybride et c’est sans doute pour cela que la Formule 1 s’y est mise aussi depuis 2014 malgré un presque triplement des coûts, et au grand dam des spectateurs qui n’ont généralement aucune idée de ce que signifie les termes MGU-K et MGU-H, perdus dans une réglementation aussi complexe qu’artificielle.
En moto, à cause d’un volume limité, l’hybride n’a pas encore fait son chemin, malgré des travaux en cours comme en témoigne la démonstration sans explication de Kawasaki en prélude aux dernières 8 Heures de Suzuka. Pour le moment, le pilote de deux-roues a donc le choix entre un moteur thermique ou un moteur électrique, mais pas les deux.
Cela n’empêche pas l’imaginatif Luigi Dall’Igna de penser que l’avenir du MotoGP pourrait passer par cette formule mixte, comme il l’a confié à Speedweek.com.
« Nous devons chercher des solutions pour améliorer
l’efficacité des moteurs. L’efficacité est l’un des points clés
pour l’avenir. Je pense donc que nous devons faire quelque chose de
différent que d’utiliser simplement le moteur à combustion. Bien
sûr, vous devez faire attention aux coûts en MotoGP, mais si vous
imposez des composants uniques pour l’unité d’entraînement hybride,
comme pour l’ECU, c’est-à-dire si la batterie et le moteur sont
identiques pour tous les constructeurs, les coûts n’augmenteraient
pas énormément.
Je n’ai pas encore fait d’études détaillées à ce sujet. C’est
pourquoi je ne peux pas faire de déclarations concrètes sur le
poids, les coûts, etc. En fin de compte, c’est un concept qui
pourrait être raisonnable s’il est planifié et bien fait. Cela
dépend de ce que vous attendez exactement d’une unité
d’entraînement efficace. Je pense que nous devrions alors
construire un moteur à combustion interne plus
petit. »
L’idée est lancée : un moteur thermique plus petit accompagné d’un moteur électrique unique. Au passage, on comprend que l’ingénieur italien n’entend pas se battre sur la partie électrique unique, sauf peut-être au moment de trouver le fournisseur unique, le groupe VAG ayant une expérience certaine dans le domaine grâce à sa stratégie « New Auto », sans même parler de la Ducati V21L MotoE qui courra l’année prochaine ou de l’arrivée probable de Porsche et Audi en F1.
Mais alors, faut-il applaudir des deux mains devant une telle évidence prônée par l’imaginatif Gigi Dall’Igna ? Certainement pas répond-on chez KTM, toujours sur Speedweek, par l’intermédiaire de Sebastian Risse, le responsable moteur de Mattighofen en MotoGP.
« KTM n’a aucun intérêt pour de telles unités d’entraînement hybrides car de tels systèmes ne sont pas utilisés en série et de tels concepts sont très coûteux. Si vous parvenez à atteindre la durabilité en utilisant 100 % de biocarburant après 2026, pourquoi devez-vous rendre les choses plus compliquées que nécessaire ? »
Allusion à la future réglementation anticipée pour le MotoGP reprise par le propriétaire du groupe autrichien, Stefan Pierer : « C’est complètement absurde ! C’est complètement hors sujet pour une moto. Mais plus d’efficacité, oui, on est d’accord. Moins de carburant, c’est quand même une tâche spéciale pour Ducati… En plus, nous allons utiliser du « biocarburant » comme en Formule 1, nous roulons dans le sillage. Nous commencerons dans le Championnat du Monde Moto3, peut-être dès 2024. En MotoGP, du biocarburant à 100 % sera utilisé en 2027. Si vous parlez aux dirigeants de la société pétrolière saoudienne Aramco, vous saurez où va l’avenir : Ils construisent déjà une capacité solaire pour la production de carburant synthétique et utilisent ensuite des cellules solaires 365 jours par an. »
Le carburant synthétique, une solution que prône également Porsche pour son activité future en compétition, mais en attendant, le biocarburant répond parfaitement au futur propos du MotoGP : produire un spectacle passionnant avec le moins d’émissions carbonées possible.
Et c’est un ancien de la Formule 1, Massimo Rivola, qui recentre le débat sur le site germanique, en expliquant pourquoi il ne faut pas suivre l’exemple de la F1…
« La priorité est la réduction des émissions de CO2,
partout dans le monde. Mais même si nous voulons être les
ambassadeurs d’un monde durable en termes de bruit, de gaz
d’échappement, etc., nous ne devons pas compromettre les grandes
émotions du Championnat du Monde MotoGP sur les circuits. Nous
n’avons pas à imiter la Formule 1. Le poids minimum des
voitures V6 de 1,6 litre est aujourd’hui de 948 kg. En 2013
avec les moteurs atmosphériques V8 de 2,4 litres, c’était encore
642 kg. En ajoutant la batterie et l’alternateur aux motos MotoGP
de 157 kg, nous devons nous attendre à des gains de poids
similaires.
Les priorités sont claires : nous devons
assurer un bon spectacle et viser le zéro émission.
Il semble que nous puissions réduire les émissions de CO2 à
zéro avec le «Bio Fuel». Si nous pouvons faire cela, ce serait
formidable. Notre objectif est de rouler à 100 % avec du
carburant non fossile en MotoGP en 2027. »
Sans rejeter une éventuelle « aide électrique » aux moteurs thermiques dans quelques années, quand les batteries pèseront moins lourd, le patron du service course Aprilia considère que le présent est au biocarburant, et non à l’hybridation. Apparemment, il n’est pas le seul puisque le sujet de l’hybridation a déjà été proposé par Ducati à la MSMA, l’association des constructeurs…
« Oui, c’était en 2021. C’est une idée qui nous a été lancée. Et les cinq autres constructeurs ont tous dit « non » car le moment n’est pas encore venu pour cela. Si Ducati veut imposer cela pour 2027, ils ont besoin de l’unanimité parmi les constructeurs. »
Crédit illustration hybride : Renault